La loi Hamon a modifié en profondeur les règles applicables à la négociation commerciale, notamment sur les délais de paiement, la convention unique, les pratiques abusives et les sanctions. Le droit des conditions générales de vente (CGV) n’a pas été épargné. Si les règles de fond applicables aux CGV ne sont pas modifiées, leur rôle dans la négociation commerciale devient plus important. Surtout, la loi Hamon impose une communication spontanée des CGV par les fournisseurs avant le 1er décembre dans le cadre de la préparation de la convention unique. Comment faire face à ces nouvelles contraintes ?

I. Ce qui ne change pas

1. L’obligation de communiquer sur demande les CGV demeure.
Bien que critiquée par le passé, l’obligation de tout producteur, prestataire de services, grossiste ou importateur de communiquer ses CGV à tout acheteur de produit ou tout demandeur de prestation de services qui en fait la demande n’a pas été supprimée (V. cpdt, exemptant les activités qui impliquent l’établissement d’un devis, Paris, 21 juin 2006, LawLex200600001482JBJ, ou les produits dont le prix est soumis à la variation des cours, Nancy, 23 juin 1998, LawLex200200213JBJ). Le maintien de cette règle augmente pourtant la transparence du marché. Or, selon le rapport Canivet, une forte transparence peut « avoir des effets contraires au jeu normal de la concurrence, en ce qu’elle permet sur des marchés concentrés, une très grande lisibilité de l’offre » alors que l’incertitude conditionne une concurrence efficace (p. 72). Par ailleurs, l’obligation de communication des CGV devait faciliter la lutte contre les refus de vente et les pratiques discriminatoires. Puisque ces règles ont été abrogées, une disposition destinée à les mettre en œuvre est-elle utile ? En réalité, les CGV ont changé de nature. Elles ont aujourd’hui pour objectif de protéger les fournisseurs contre la grande distribution et garantir que la négociation se conduise, au moins au départ, sur la base des conditions du fournisseur.

2. Le contenu des CGV demeure inchangé.
Les CGV comprennent toujours, aux termes de l’article L 441-6, I, du Code de commerce, les conditions de vente, le barème des prix unitaires, les réductions de prix et les conditions de règlement (qui doivent obligatoirement prévoir les conditions d’application et le taux d’intérêt des pénalités de retard – qui ne sauraient être inférieures à 3 fois le taux d’intérêt légal – ainsi que le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement).

3. Les conditions catégorielles de vente sont toujours autorisées.
Les CGV peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de demandeurs de prestations de service. Dans ce cas, l’obligation de communication porte uniquement sur les CGV applicables aux acheteurs de produits ou aux demandeurs de prestation de services d’une même catégorie.

II. Ce qui change.

4. Les CGV deviennent le socle « unique » de la négociation commerciale.
Précédemment qualifiées de socle de la négociation commerciale, les CGV passent avec la loi Hamon au rang de socle unique. Quel est le sens de cette modification sémantique ? Les CGV primeraient-elles absolument sur les conditions générales d’achat (CGA) ? La réponse demeure négative. Si l’article L. 441-6, I, du Code de commerce prévoit que les CGV forment le socle unique de la négociation, il précise immédiatement que dans le cadre de cette négociation, le vendeur peut convenir avec son partenaire de conditions particulières de vente. Il s’agit donc d’un principe d’antériorité chronologique et non de primauté : les CGV constituent seulement le point de départ de la négociation commerciale et servent de base à cette négociation. Dans ces conditions, encore davantage que par le passé (Paris, 18 déc. 2013, LawLex201300001881JBJ), écarter contractuellement d’emblée les CGV au profit des CGA exposera l’acheteur à la sanction des obligations déséquilibrées.

5. Les CGV doivent faire l’objet d’une communication spontanée dans le cadre de la préparation de la convention unique.
La loi Hamon impose désormais au fournisseur de communiquer ses CGV au distributeur au plus tard le 1er décembre ou deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation, pour les produits ou services soumis à un cycle de commercialisation particulier (C. com., art. L 441-7, I, al. 7). Cette communication spontanée des CGV ne s’impose bien entendu que si la relation commerciale en cause exige elle-même la rédaction d’une convention unique (V., pour des exemples d’exclusion du champ de la convention unique : le contrat de courtage, Paris, 21 nov. 2012, LawLex201200002361JBJ ; les clients transformateurs, réponse DGCCRF 08112801 in Avis CEPC du 22 déc. 2008). Aucune sanction spécifique n’est attachée au défaut de communication spontanée des conditions générales de vente dans le délai imparti. Cependant, le fournisseur défaillant ne se verra-t-il pas imputer la responsabilité de l’absence de convention unique dans les délais impartis, ou ne fera-t-il pas l’objet d’une injonction au titre du pouvoir général reconnu à l’Administration sur le fondement de l’article L. 465-1 du Code de commerce ? Il est donc très fortement recommandé de respecter ce délai. L’acheteur, lui, rappellera à ses fournisseurs la nécessité de lui communiquer les CGV et leur adressera un rappel en cas de retard dans la communication.