Depuis son entrée en vigueur, la loi Thévenoud du 1er octobre 2014 entraîne beaucoup d’insécurité juridique (cf. blog, billets du 23 février et 3 avril). Dans le cadre du contentieux qui l’oppose aux taxis et VTC, qui taxent son service entre particuliers « UberPop » de concurrence déloyale, la société américaine Uber a posé trois questions de constitutionnalité (QPC) portant sur la tarification horokilométrique, la géolocalisation ou « maraude électronique » et le « retour à la base » que la loi Thévenoud réserve aux taxis, au mépris, selon elle, de la liberté d’entreprendre.

Sur la tarification horokilométrique, c’est-à-dire calculée en fonction de la distance et du temps de trajet, Uber obtient gain de cause et avec elle, l’ensemble des VTC. Le Conseil constitutionnel considère qu’en réservant ce monopole aux taxis, le législateur a effectivement porté une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre des voitures de tourisme avec chauffeur.

Sur la géolocalisation, qui permet de localiser les véhicules disponibles par l’intermédiaire d’une application smartphone, comme c’est le cas précisément de l’application UberPop, le Conseil valide l’interdiction imposée aux VTC. Toutefois, il considère que la prohibition de la maraude électronique exclut l’indication simultanée de la disponibilité et de la localisation d’un VTC, mais pas la possibilité de préciser soit l’un, soit l’autre. En pratique, via son application smartphone, un client pourrait ainsi connaître en temps réel soit les VTC disponibles, mais sans pouvoir les géolocaliser, soit les VTC les plus proches de lui, mais sans voir s’ils sont disponibles…

Concernant le principe de retour à la base, qui impose aux VTC de rentrer à leur base (souvent située en banlieue) entre deux courses ou dans un lieu – hors de la chaussée – où le stationnement est autorisé, s’ils n’ont pas d’autres pré-réservations, le Conseil constitutionnel estime qu’il n’est pas anticonstitutionnel et qu’il doit être appliqué aux taxis lorsqu’ils se situent en dehors de leur zone de stationnement, dans une situation identique à celle des VTC. Cependant, le retour à la base qui n’exclut pas la prise de commandes en chemin, ne devrait pas réellement impacter les taxis qui, en pratique, enchaînent les courses, notamment en ayant recours à la maraude. Même son de cloche du côté des VTC qui, via leur centrale, accumulent réservation sur réservation.

La décision du Conseil constitutionnel a été accueillie favorablement tant par les taxis que par les VTC. Les premiers, parce qu’ils considèrent que leur monopole le plus important, celui de la maraude, a été préservé et les seconds, parce qu’ils peuvent pratiquer la tarification horokilométrique. En ce qui concerne la géolocalisation qui impliquerait de modifier l’application UberPop, Uber déclare ne pas vouloir modifier son application tant que la Cour d’appel de Paris, statuant sur la base des réponses apportées à ces QPC, n’a pas rendu son arrêt. Uber rappelle par ailleurs qu’il a saisi la Commission européenne de plaintes à l’encontre de la France, de l’Espagne et de l’Allemagne, aux motifs que la législation de ces pays sur les taxis viole le droit de l’Union et en particulier, la liberté d’établissement. La bataille juridique n’est donc pas terminée…