Un arrêt rendu le 30 septembre 2015 par la Cour d’appel de Paris (LawLex201500001190JBJ), dans une affaire concernant le réseau de montres Rolex, mérite la pleine attention des animateurs de réseaux de distribution sélective.

En l’occurrence, la marque avait notifié au distributeur agréé la résiliation ordinaire de son contrat, en lui accordant le bénéfice du préavis contractuel de six mois.

Le distributeur faisait valoir que cette décision, non motivée, caractérisait une discrimination puisqu’il remplissait toujours les critères d’agrément.
L’affaire fournit à la cour d’appel l’occasion d’énoncer de manière très claire toute une série de principes très favorables à l’efficience des réseaux sélectifs :

– l’existence d’une discrimination dans la mise en Å“uvre des critères de sélection ne peut être appréciée qu’aux stades de l’agrément au sein du réseau et de l’exécution du contrat, mais pas à celui de sa rupture ;

– le droit à mettre fin à tout engagement et la prohibition des conventions perpétuelles s’applique à la distribution sélective, que le revendeur agréé respecte ou non les critères d’agrément ;

Рle principe de la libert̩ contractuelle dispense le fournisseur de toute obligation de conclure un contrat de distribution s̩lective avec tout distributeur remplissant les crit̬res de s̩lection ;

– les pratiques discriminatoires ne constituent pas des restrictions caractérisées et ne peuvent être qualifiées d’ententes anticoncurrentielles si le fabricant détient une part de marché inférieure à 30 %.

Enfin, la cour rappelle que « les accords de distribution sélective sont des accords très stricts, conclus intuitu personae et, au regard des références personnelles de chaque société ».

La décision est importante, car elle conforte très clairement le droit de la tête de réseau de rompre un contrat de distribution sélective quand bien même le distributeur continuerait de respecter les critères d’agrément et n’aurait pas commis de faute particulière.
En décider autrement reviendrait à priver les têtes de réseaux de distribution sélective d’une faculté de résiliation ordinaire offerte dans tous les autres types de contrats, qu’aucune spécificité de la distribution sélective ne justifierait.
En revanche, bien que très favorable aux têtes de réseau, l’affirmation de la liberté totale d’agrément des membres du réseau doit être prise avec précaution : en l’état actuel du droit, cette faculté semble réservée aux réseaux de distribution sélective quantitative, ce que l’arrêt commenté ne précise pas.

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