Cette question défraye la chronique depuis plusieurs semaines. Malgré une réception en Allemagne, le gouvernement français a décidé de bloquer l’immatriculation sur le territoire national de certains véhicules de marque Mercedes.

La décision est exceptionnelle tant au point de vue de ses conséquences pratiques qu’au regard des règles en vigueur.

Malgré une réception en Allemagne, le gouvernement français a décidé de bloquer l’immatriculation sur le territoire national de certains véhicules de marque Mercedes. Les acheteurs des modèles concernés, qui représenteraient au moins un tiers des véhicules vendus par la marque, ne peuvent plus les immatriculer. Les concessionnaires, mis en porte-à-faux vis-à-vis de leurs clients actuels, voient leurs ventes s’effondrer.

Du point de vue juridique,  la réglementation en vigueur, fondée sur la nécessité d’assurer la libre circulation des biens au sein de l’Union, principe fondateur du droit européen, prévoit que les États membres doivent reconnaître la conformité aux normes applicables reconnue par un autre État et, en conséquence, faire le nécessaire pour qu’il puisse être procédé à leur immatriculation.

Une clause de sauvegarde, prévue par le TFUE, permet toujours aux États membres de porter des atteintes à la libre circulation des marchandises, si elles sont justifiées par des motifs impérieux, tenant par exemple à la sécurité des biens ou à la préservation de l’environnement. Cette clause de sauvegarde peut être mise en œuvre  en cas de réception des véhicules par un autre État membre (l’article 29 de la directive 2007/46/CE, dont les dispositions ont été transposées  à l’article R. 321-14 du code de la route, précise dans quelles conditions).

Cependant, comme chaque fois qu’il s’agit de porter une atteinte à un principe fondateur du droit de l’Union, la mise en œuvre d’une telle clause de sauvegarde doit répondre à des conditions strictes et suppose que soit démontré un risque grave pour l’environnement.

Sous réserve de ce que dira le Conseil d’État, il est permis de penser que ces conditions ne sont pas réunies en l’espèce : ce qui est reproché à DaimlerChrysler, c’est d’utiliser, comme elle y a d’ailleurs été autorisée par l’organisme chargé des réceptions de véhicules en Allemagne, un gaz réfrigérant qui est utilisé et va continuer à l’être notamment par tous les véhicules actuellement en circulation et  par  tous  les nouveaux véhicules qui correspondent à des  anciens types et seront mis en circulation jusqu’au 31 décembre 2016.

Dans ces conditions, bloquer les immatriculations motif pris d’une atteinte grave et immédiate à l’environnement, en mettant en péril l’activité des concessionnaires français de la marque et de leurs salariés, est à l’évidence totalement disproportionné.