RECHERCHE PAR MOTS CLÉS
Utiliser le filtre pour affiner votre recherche
[wd_asp id=1]CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Concentrations
Les voies de recours pouvant être exercées dans le cadre du contrôle des concentrations ne sont pas régies par le Code de commerce. Conformément au droit commun, les décisions rendues en matière de concentrations peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir dans la mesure où elles émanent d’une autorité administrative. Les lignes directrices consacrent la compétence exclusive du Conseil d’État pour connaître des décisions tant de l’Autorité de la concurrence que du ministre. La compétence du juge administratif n’exclut pas celle du juge civil pour faire droit à l’action en réparation d’un opérateur lésé par le non-respect des engagements auxquels était subordonnée l’autorisation d’une concentration. Le recours en annulation doit être formé dans un délai de deux mois devant le Conseil d’État qui examine la légalité interne et externe de l’acte. Il exerce un contrôle entier de la décision, qui peut l’amener à adopter une approche économique.
Toutes les décisions portant sur l’autorisation ou l’interdiction des opérations de concentration, mais aussi certaines décisions connexes, notamment en matière de publication ou d’agrément d’un repreneur d’actifs, sont susceptibles de recours. Les actes de soft law (avis, recommandations, mises en garde et prises de position) adoptés par l’Autorité dans l’exercice des missions dont elle est investie, peuvent être déférés au juge de l’excès de pouvoir lorsqu’ils revêtent le caractère de dispositions générales et impératives, ou énoncent des prescriptions individuelles dont l’autorité pourrait ultérieurement censurer la méconnaissance ou sont de nature à produire des effets notables, notamment de nature économique, ou encore ont pour objet d’influer de manière significative sur les comportements des personnes auxquelles ils s’adressent.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Pratiques restrictives
Le refus de vente opposé par un fournisseur à un partenaire avec lequel il entretient des relations commerciales depuis de nombreuses années peut caractériser une rupture brutale de relations commerciales établies, à moins que soit démontré le caractère anormal de la commande ou l’impossibilité matérielle de la satisfaire. Comme le refus de vente, le refus de prestation peut tomber sous le coup de l’article L. 442-1, II du Code de commerce. Ainsi, le partenaire qui refuse de reprendre l’exécution d’une prestation, qui a fait l’objet d’une rupture partielle, doit endosser la responsabilité de la rupture définitive des relations. En revanche, le refus de vente n’est pas condamnable lorsqu’il repose sur une série d’incidents de paiement de la part de sa prétendue victime.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Abus de position dominante
Les autorités de contrôle estiment que lorsqu’une entreprise dominante utilise des « procédés normaux de concurrence », ses activités ne sont pas répréhensibles. Pour apprécier l’anormalité du comportement de l’entreprise, le juge européen applique, selon une règle de raison, un contrôle de proportionnalité : l’action de l’entreprise dominante est considérée comme « anormale » dès lors qu’elle dépasse ce qui est nécessaire à la protection de ses intérêts légitimes. En effet, la position dominante ne prive pas l’entreprise du droit de préserver ses propres intérêts commerciaux lorsque ceux-ci sont menacés, à condition que cette protection soit fondée sur des critères d’efficacité économique et présente un intérêt pour les consommateurs.
L’entreprise en position dominante doit démontrer que son comportement est objectivement nécessaire ou que l’effet d’éviction qu’il entraîne peut être contrebalancé, voire surpassé, par des avantages en termes d’efficacité qui profitent également aux consommateurs. Mais des stratégies légitimes en elles-mêmes peuvent devenir abusives lorsqu’elles sont poursuivies conjointement à des pratiques dépassant la sauvegarde des intérêts commerciaux, le fait qu’elles constituent la pratique généralement suivie dans un secteur déterminé étant indifférent. Il est également tenu compte de l’importance de l’effet anticoncurrentiel. Lorsqu’une partie substantielle de la demande demeure satisfaite ou qu’il existe des solutions alternatives pour le consommateur, l’abus n’est pas constitué. Au contraire, le verrouillage partiel du marché ne peut être justifié par le caractère suffisant de la partie restant à conquérir pour un nombre limité de concurrents. L’utilisation d’une « règle de raison » aboutit, finalement, à réduire la liberté d’action de l’entreprise dominante proportionnellement à l’importance de son pouvoir de domination. Plus le pouvoir de l’entreprise dominante est important relativement au marché sur lequel elle se situe, plus son autonomie de comportement est réduite.
La Commission a tenté de rationaliser son appréciation en adoptant une communication destinée à servir de document d’orientation lors de l’application de l’article 102 TFUE aux abus d’exclusion. L’entreprise dominante peut justifier son comportement en prouvant qu’il est objectivement nécessaire ou qu’il entraîne des gains d’efficacité de nature à compenser ses effets restrictifs. Pour démontrer la réalité des gains d’efficience, l’entreprise dominante devra établir avec une probabilité raisonnable et sur la base de preuves vérifiables que quatre conditions cumulatives sont remplies : (i) les gains d’efficience résultent du comportement en cause ; (ii) il n’existe aucun moyen alternatif moins restrictif pour les réaliser ; (iii) les gains d’efficience compensent les atteintes à la concurrence et au bien-être du consommateur sur les marchés concernés ; (iv) le comportement n’élimine pas une concurrence effective en supprimant la totalité ou la plupart des sources existantes de concurrence actuelle ou potentielle.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
Depuis la fin des années 1970, on a vu se développer en droit européen un système d’appréciation extrêmement favorable de certaines restrictions de concurrence que les auteurs ont baptisé « règle de raison », à l’instar de la « rule of reason » américaine. Identique dans son principe, la règle de raison revêtait cependant une portée très différente de son homologue américaine, puisqu’elle n’était pas d’application générale, mais se limitait à certains cas particuliers.
La règle de raison permettait d’accorder un traitement de faveur à certains comportements anticoncurrentiels, en appréciant exclusivement leurs effets dans le cadre du paragraphe 1er de l’article 101 TFUE et en évitant ainsi de soumettre d’abord la pratique à cette règle avant de l’exonérer éventuellement sur le fondement de son paragraphe 3. Seulement, ce raccourci n’était possible que dans la mesure où il apparaissait très clairement que l’atteinte à la concurrence constatée était compensée par les effets bénéfiques déterminés par l’entente, et à la condition également que l’accord ne contenait pas de restrictions patentes, comme la fixation des prix, la répartition du marché, ou le contrôle des débouchés.
Le Tribunal de l’Union, récemment approuvé par la Cour de justice, semble avoir voulu porter un coup d’arrêt au développement de la règle de raison en affirmant que « l’existence d’une telle règle n’a, en tant que telle, pas été confirmée par le juge communautaire ». Selon le juge européen, la reconnaissance de la règle de raison remettrait en cause la structure normative de l’article 101 TFUE, dont le paragraphe 3 perdrait tout effet utile. L’examen du caractère objectivement nécessaire d’une restriction de concurrence ne saurait impliquer une mise en balance de ses effets pro- et anticoncurrentiels, hors du cadre de l’article 101, paragraphe 3. Dès lors, la jurisprudence, qui semble appliquer la règle de raison, s’inscrirait plutôt dans un courant d’appréciation in concreto de l’accord, qui implique, au-delà de l’analyse de ses clauses, de tenir compte du cadre réel dans lequel l’accord produit ses effets. La prétendue règle de raison se réduirait à la prise en considération du contexte économique et juridique.
L’affirmation du Tribunal et de la Cour ne rend pas compte de la réalité. Indépendamment du fait qu’une appréciation contextuelle de la restriction peut en elle-même déjà être considérée comme une manifestation de la règle de raison, il est incontestable qu’une telle règle a été consacrée par les autorités de l’Union qui n’ont pas hésité à justifier des restrictions de concurrence sur le fondement de la théorie des restrictions accessoires, de l’état de nécessité ou du bilan économique.
En vertu de la théorie des restrictions accessoires, si l’opération principale couverte par l’accord ne restreint pas la concurrence, il n’est plus nécessaire d’examiner la compatibilité des restrictions individuelles contenues dans l’accord. Selon la communication 2004/C 101/08 relative à l’application de l’article 101, paragraphe 3, TFUE, « [u]ne restriction est directement liée à l’opération principale si elle est subordonnée à la réalisation de cette opération et est liée à celle-ci de manière indissociable. Le critère de la nécessité implique que la restriction doit être objectivement nécessaire à la réalisation de l’opération principale et être proportionnée par rapport à celle-ci ». La Cour de justice estime que l’opération principale doit s’avérer impossible et non seulement plus difficilement réalisable ou moins profitable sans la restriction accessoire. Pour réfuter le caractère accessoire d’une restriction, la Commission peut procéder à une analyse contrefactuelle consistant à vérifier l’existence d’alternatives réalistes et moins attentatoires à la concurrence que la restriction en cause. La durée et le champ d’application matériel et géographique de la restriction ne doivent, en outre, pas excéder ce qui est nécessaire pour la réalisation de l’opération principale. Ainsi, une clause de non-concurrence qui est nécessaire au transfert de la valeur commerciale d’une entreprise ou à la période de démarrage d’une entreprise commune et qui est limitée dans le temps et dans l’espace constitue une restriction accessoire. Il en est de même pour les clauses d’exclusivité ou de priorité. En revanche, la restriction de concurrence qui découle d’un système de limitations territoriales nationales n’est ni objectivement nécessaire ni inhérente à la protection des droits d’auteur lorsque d’autres méthodes permettant la concession de licences multirépertoires sont envisageables. Pareillement, une clause de non-concurrence ne peut être qualifiée de restriction accessoire lorsqu’elle subsiste en dépit de la renonciation des parties à la mise en oeuvre de l’opération principale ou n’est pas nécessaire à sa réalisation en raison d’un cadre légal suffisamment protecteur. Enfin, un comportement arrêté par deux concurrents non dans le cadre d’un accord principal ni même à l’occasion de sa conclusion, mais plusieurs années après celle-ci, ne peut être considéré comme une restriction accessoire.
Par ailleurs, la jurisprudence européenne semblait admettre dans certains cas qu’une stratégie défensive mise en oeuvre par une entreprise placée dans un état de nécessité peut constituer une cause d’exonération. Une entente ne pouvait en principe trouver sa justification dans le seul comportement anticoncurrentiel des concurrents. Mais elle pouvait être justifiée par l’existence d’un état de nécessité, qui, comme la légitime défense, suppose une situation d’urgence, la menace d’un danger actuel ou imminent et la réponse à cette menace par un acte nécessaire et proportionné. Une réelle menace devait peser sur l’entreprise et sa survie ne pas pouvoir être assurée par un autre moyen. Les autorités de concurrence se montraient plus réticentes à l’égard des cartels de crise, qui ne pouvaient éventuellement être exonérés que dans le cadre d’une exemption individuelle, mais qui étaient insusceptibles de constituer une circonstance atténuante en cas d’infliction d’amende.
Enfin, la règle de raison pouvait être mise en œuvre uniquement lorsqu’il apparaissait très clairement que l’atteinte à la concurrence constatée érait compensée par ses effets bénéfiques. L’appréciation in concreto d’un accord, qui consiste à analyser la situation de la concurrence en son absence et à vérifier son impact concret sur la concurrence s’inscrit dans ce cadre. Plus spécifiquement, pour apprécier les effets positifs, ou proconcurrentiels, qui justifieraient la pratique, les autorités européennes établissaient parfois un véritable bilan économique, en particulier dans le domaine des accords verticaux. Selon les principes traditionnellement appliqués pour l’établissement d’un bilan économique, plus graves sont les atteintes à la concurrence, en fonction notamment de la part de marché de l’ensemble en cause et de ses pratiques anticoncurrentielles, plus tangible doit être la contribution qu’il prétend apporter au progrès économique. Le juge européen a ainsi considéré que la concession d’une licence exclusive ouverte, qui n’interdit pas les importations parallèles ni les licences pour d’autres territoires, mais permet la diffusion d’une nouvelle technologie, n’est pas en soi incompatible avec le Traité et que l’ensemble des clauses restrictives incluses dans un contrat de franchise en vue d’assurer la protection du savoir-faire transmis ou la préservation de l’identité et de la réputation du réseau ne constituaient pas des restrictions de concurrence au sens de l’article 101, paragraphe 1, TFUE. De même, la création d’une entreprise commune entre non-concurrents ne restreignait pas la concurrence si l’accord se limitait à prévoir ce qui était nécessaire pour garantir le démarrage et le bon fonctionnement de l’entreprise. Dans tous les cas, l’appréciation favorable des autorités de contrôle est justifiée par le fait que la restriction de concurrence était le moyen de l’apparition de nouveaux concurrents sur le marché et demeurait à l’évidence accessoire par rapport à l’objectif légitime dont elle permet la réalisation.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Abus de position dominante
L’Autorité de la concurrence considère licite l’ensemble des comportements de l’entreprise dominante justifiés par des « nécessités objectives ». Cette règle de raison consiste à mettre en balance l’intérêt légitime de l’entreprise et les effets anticoncurrentiels entraînés par son comportement. Si une clause d’exclusivité n’est pas illégale en soi, elle le devient dès lors qu’elle est disproportionnée et s’étend à des marchés autres que ceux sur lesquels intervient l’entreprise dominante. À l’inverse, la mise en place d’un service après-vente de qualité peut justifier un abus de position dominante.
Les décisions les plus récentes reflètent la volonté des autorités de contrôle d’accorder une plus grande place aux incidences économiques du comportement dans le cadre de cette appréciation. Les condamnations en soi des abus de position dominante ont peu à peu cédé la place à une approche par les effets qui permet aux entreprises de justifier objectivement leur comportement ou de mettre en avant des gains d’efficacité de nature à contrebalancer les effets anticoncurrentiels constatés sur le marché. Dans ses lignes directrices relatives aux abus d’exclusion, la Commission admet que l’abus puisse être racheté par des gains d’efficacité. Elle impose cependant aux entreprises mises en cause d’apporter la preuve que quatre conditions cumulatives sont réunies : les gains doivent être réalisés ou susceptibles d’être réalisés du fait du comportement considéré ; le comportement doit être nécessaire à la réalisation des gains sans recours possible à une solution moins anticoncurrentielle ; les gains doivent l’emporter sur les probables effets anticoncurrentiels ; la concurrence ne doit pas être éliminée sur le marché par le comportement en cause.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Domaine d’application
En principe, les articles 101 et 102 TFUE ne visent que les entreprises. Il ressort toutefois de la combinaison de ces textes avec les articles 3, b) TFUE (établissement de règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché intérieur) et 4 TUE (abstention de mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union), qu’un État membre ne peut prendre ou maintenir en vigueur des mesures, qu’elles soient de nature législative ou réglementaire, qui élimineraient l’effet utile des articles 101 et 102. Contraires au droit européen, ces réglementations sont dépourvues d’efficacité.
Un État ne saurait faciliter l’exploitation abusive d’une position dominante, favoriser la conclusion d’une entente ou renforcer les effets d’un comportement anticoncurrentiel. Les autorités européennes condamnent également les actes par lesquels un État retire à sa propre réglementation son caractère étatique en déléguant à des opérateurs privés la responsabilité de prendre des décisions d’intervention économique. Il en va ainsi de la réglementation nationale en vertu de laquelle le prix de services est fixé par un organisme composé principalement de représentants des opérateurs économiques concernés qui n’est pas tenu d’agir pour la défense de l’intérêt général. Il en va autrement lorsque l’organisme en cause ne rend qu’un avis consultatif ou est seulement auditionné avant que l’Etat prenne la décision finale.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Procédure
Aux termes de l’article L. 462-10 du Code de commerce, « [d]oit être communiqué à l’Autorité de la concurrence, à titre d’information, au moins quatre mois avant sa mise en œuvre, tout accord entre des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales exploitant, directement ou indirectement, un ou plusieurs magasins de commerce de détail de produits de grande consommation, ou intervenant dans le secteur de la distribution comme centrale de référencement ou d’achat d’entreprises de commerce de détail, visant à négocier de manière groupée l’achat ou le référencement de produits ou la vente de services aux fournisseurs ». Le texte a pour vocation de permettre à l’Autorité de la concurrence « d’assurer son rôle de veille de manière efficace » s’agissant d’opérations qui, sans relever du contrôle des concentrations, peuvent poser des problèmes de concurrence.
L’obligation d’information préalable est subordonnée au dépassement d’un double seuil de chiffre d’affaires, fixé à l’article R. 462-5 du Code de commerce : le chiffre d’affaires total mondial hors taxes de l’ensemble des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales parties aux accords doit être supérieur à 10 milliards d’euro et le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé à l’achat en France dans le cadre de ces accords par l’ensemble des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales parties aux accords doit être supérieur à 3 milliards d’euros. Pour l’appréciation de ce dernier seuil, deux ou plusieurs accords au sens de l’article L. 462-10 conclus au cours d’une période de deux années entre les mêmes entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales seront considérés comme un seul accord intervenant à la date du premier.
Outre un élargissement du délai de notification, qui passe de deux à quatre mois avant la réalisation de la l’opération, la loi EGalim du 30 octobre 2018 organise une procédure de bilan concurrentiel ex post de l’accord. Le bilan est effectué par l’Autorité de la concurrence de sa propre initiative ou à la demande du ministre de l’Economie. A cet effet, l’Autorité peut demander aux parties à l’accord de lui transmettre un rapport présentant son effet sur la concurrence. L’Autorité examine si l’accord est de nature à porter une atteinte sensible à la concurrence au sens des articles L. 420-1 et L. 420-2 et apprécie s’il apporte au progrès économique une contribution suffisante pour compenser d’éventuelles atteintes à la concurrence, en prenant en compte son impact tant pour les producteurs, les transformateurs et les distributeurs que pour les consommateurs. Si des atteintes à la concurrence ou des effets anticoncurrentiels ont été identifiés, les parties à l’accord s’engagent à prendre des mesures visant à y remédier dans un délai fixé par l’Autorité de la concurrence. L’Autorité de la concurrence peut également se saisir d’office en application du III de l’article L. 462-5 ou être saisie par le ministre de l’Economie en application du I du même article. L’Autorité peut aussi prendre des mesures conservatoires selon les modalités et dans les conditions prévues au dernier alinéa de l’article L. 464-1 dès lors que les atteintes à la concurrence que l’accord entraîne ou est susceptible d’entraîner immédiatement après son entrée en vigueur, présentent un caractère suffisant de gravité. Ces mesures peuvent comporter une injonction aux parties de revenir à l’état antérieur ou de modifier l’accord.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Procédure
La réitération de pratiques anticoncurrentielles constitue une circonstance aggravante particulière dont la loi prévoit une prise en considération autonome afin de répondre de façon proportionnée à la propension d’un opérateur de s’affranchir des règles de concurrence.
Pour constater l’existence d’une réitération, quatre conditions cumulatives doivent être réunies :
- une précédente infraction doit avoir été constatée,
- les nouvelles pratiques doivent être identiques ou similaires, par leur objet ou leur effet, à celles qui ont fait l’objet du précédent constat d’infraction,
- ce constat doit être devenu définitif à la date à laquelle l’Autorité de la concurrence statue sur les nouvelles pratiques,
- le délai écoulé entre le constat d’infraction et la commission des nouvelles pratiques doit être inférieur à quinze ans.
La circonstance aggravante fondée sur la réitération de pratiques anticoncurrentielles peut être retenue pour de nouvelles pratiques identiques ou similaires, par leur objet ou leur effet, à celles ayant donné lieu au précédent constat d’infraction sans que cette qualification n’exige une identité quant à la pratique mise en œuvre ou quant au marché concerné. La réitération peut ainsi être retenue même si la nouvelle pratique ne porte pas sur la même catégorie de produits que la précédente et si le contrevenant a été poursuivi une première fois pour une infraction commise personnellement et une deuxième fois en tant que société mère responsable du comportement anticoncurrentiel de sa filiale. Il en va ainsi même si les premières pratiques portent sur des marchés ou zones géographiques différents ou plus restreints et si les constats d’infraction concernent des services qui, tout en étant différents, relèvent du même secteur d’activité, si la structure du marché ou la position de l’entreprise ont changé depuis lors, si les entreprises sanctionnées sont différentes, dès lors qu’elles forment une seule et même entité économique, ou si le constat de la première infraction a été réalisé dans le cadre d’une procédure négociée. Le fait que des pratiques aient débuté avant qu’une précédente infraction ait fait l’objet d’un constat d’infraction n’exclut pas non plus la prise en considération de la réitération, dès lors que les nouvelles pratiques, de nature continue, se sont poursuivies après le premier constat d’infraction.
En cas de réitération, le montant intermédiaire de la sanction pécuniaire peut être augmenté dans une proportion comprise entre 15 et 50 %.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Abus de position dominante
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
Les remises qualitatives constituent des réductions de prix qu’un fournisseur accorde à son distributeur en contrepartie des services que ce dernier lui rend afin de maintenir ou conforter son image de marque, développer ses ventes et intensifier la concurrence avec les autres marques. Les remises qualitatives ne tombent pas sous le coup de l’article L. 420-1 du Code de commerce lorsqu’elles ne s’accompagnent d’aucune sélection quantitative des distributeurs, sont définies de manière objective, ne sont pas appliquées de façon discriminatoire et n’ont ni pour objet ni pour effet de limiter la liberté des commerçants de déterminer de façon autonome leur politique de prix de revente. Leurs conditions de licéité sont alignées sur celles de la distribution sélective. Des services tels que la démonstration des produits à la demande des clients ou l’assistance technique au consommateur (services de réparation et de livraison) sont susceptibles de justifier l’octroi de remises qualitatives.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Concentrations
Le règlement 139/2004 du 29 janvier 2004 prévoit un système, dit de « renvoi », qui permet de réattribuer les affaires à l’autorité la plus appropriée, même si les seuils de contrôle sont dépassés ou au contraire ne sont pas atteints. Il ne s’agit pas pour autant pour les entreprises de pratiquer le forum shopping et de se fixer sur l’autorité la plus favorable. La Commission et les autorités des États membres disposent d’une large marge d’appréciation pour décider de renvoyer une affaire qui relève de leur compétence initiale ou accepter d’examiner celles qui n’en relèvent pas. La communication 2005/C 56/02 définit les conditions du renvoi. L’attribution doit se faire à l’autorité la plus appropriée pour examiner l’opération compte tenu notamment des instruments et de l’expertise dont elle dispose, du lieu probable où se feraient ressentir les effets de la concentration et du risque d’appréciations contradictoires. La fragmentation des affaires sous l’effet des renvois doit être évitée afin de maintenir autant que possible un guichet unique.
Les parties peuvent, avant la notification, présenter une demande de renvoi de l’affaire soit à un Etat membre, soit à la Commission (Règl. 139/2004, art. 4, paragr. 4 et 5). Deux conditions sont requises pour justifier le renvoi à un Etat membre : la concentration doit affecter la concurrence de manière significative sur un ou plusieurs marchés, qui doivent être situés à l’intérieur d’un État membre et constituer un marché distinct. Les parties, qui ne sont pas tenues d’établir le caractère néfaste des effets produits sur la concurrence, doivent indiquer les marchés affectés et apporter la preuve de leur caractère national ou infranational. La nécessité de mener une enquête coordonnée et de prononcer des mesures correctives peut constituer un obstacle à sa réattribution à une autorité nationale. Le renvoi à la Commission peut être demandé par les parties, lorsque leur concentration, dénuée de dimension européenne, est notifiée aux autorités d’au moins trois États membres. La demande de renvoi n’est recevable que si aucun État membre compétent pour examiner l’opération n’a exprimé son désaccord. La Commission est la mieux placée pour connaître d’une telle concentration lorsque le ou les marchés affectés dépassent le territoire national ou que l’effet économique essentiel est lié à de tels marchés.
Le renvoi peut aussi être effectué postérieurement à la notification, soit sur l’initiative des Etats membres, soit sur invitation de la Commission (Règl. 139/2004, art. 9 et 22). L’article 9 du règlement organise, par dérogation au principe de compétence exclusive de la Commission pour examiner les concentrations de dimension européenne, une procédure de renvoi devant les autorités d’un État membre. Un État membre peut demander le renvoi à ses propres autorités de contrôle dans deux cas : la concentration menace d’affecter de manière significative la concurrence sur un marché situé à l’intérieur de cet État membre qui présente toutes les caractéristiques d’un marché distinct ; la concentration affecte la concurrence sur un marché situé à l’intérieur de cet État membre qui présente toutes les caractéristiques d’un marché distinct et qui ne constitue pas une partie substantielle du marché intérieur. Dans le premier cas, la Commission peut soit rétablir elle-même la concurrence sur le marché concerné, soit renvoyer tout ou partie du cas aux autorités nationales en vue de l’application de leur propre législation sur la concurrence, tandis que dans le second, elle est tenue d’effectuer le renvoi si les critères juridiques sont respectés. Le marché géographiquement « distinct »s’entend de celui sur lequel les conditions de la concurrence sont suffisamment homogènes et différentes de celles qui règnent sur les territoires voisins. Enfin, en vertu de l’article 22, paragraphe 1, du règlement, une concentration de dimension nationale peut être renvoyée à la Commission à la demande d’un ou plusieurs États membres si l’opération de concentration, en dépit de son absence de dimension européenne, menace d’affecter de manière significative la concurrence sur leur territoire tout en affectant le commerce entre États membres. Une fois le renvoi effectué, l’État membre ne peut plus ni contrôler le déroulement de l’examen de la Commission, ni délimiter le champ de ses investigations. La seule limite à l’intervention de la Commission est de nature géographique. Elle ne peut prendre les mesures strictement nécessaires au rétablissement de la concurrence que sur le territoire des États à la demande desquels elle est intervenue. En outre, compte tenu des difficultés qui entourent les mesures de déconcentration, lorsque la concentration a déjà été réalisée au moment où la Commission est appelée à statuer, elle peut décider de ne pas assortir sa décision d’incompatibilité de mesures de déconcentration et inviter les parties à proposer des mesures appropriées avant d’arrêter sa décision.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
Les accords de répartition de marché sont généralement des accords conclus entre concurrents par lesquels ceux-ci conviennent de ne pas se livrer concurrence sur certains marchés géographiques ou à l’égard de certaines clientèles. Ils peuvent revêtir des formes diverses : réponse concertée à un appel d’offres, partage d’activités entre membres d’un groupement, engagement de non-concurrence, accords de report d’entrée ou de « pay-for-delay », voire clause de protection territoriale absolue dans certains accords verticaux.
Les accords de répartition de marché tombent presque systématiquement sous le coup de l’article 101 TFUE : la répartition des marchés ou des clients réduit le choix des utilisateurs et provoque une augmentation des prix, voire une réduction de la production. Considérés comme des restrictions par objet, ils dispensent la Commission d’avoir à apprécier leurs effets réels sur le marché. Toutefois, selon les lignes directrices de la Commission relatives aux accords de coopération horizontale (2011/C 11/01), si les parties apportent la preuve que leur accord, même s’il contient une clause de répartition des marchés, améliore la production ou présente un caractère indispensable, une exemption individuelle peut lui être accordée.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
Les accords de répartition de marché sont généralement des accords conclus entre concurrents par lesquels ceux-ci conviennent de ne pas se livrer concurrence sur certains marchés géographiques ou à l’égard de certaines clientèles. Ils peuvent revêtir des formes diverses : réponse concertée à un appel d’offres, partage d’activités entre membres d’un groupement, engagement de non-concurrence, voire clause de protection territoriale absolue dans certains accords verticaux. Expressément visés par le 4° de l’article L. 420-1 du Code de commerce, ces accords tendent à maintenir la position des entreprises en place et sont habituellement le fait d’entreprises dominantes, souvent leaders ou bénéficiaires d’une exclusivité. Les marchés concentrés favorisent le partage. Considérés comme des restrictions par objet, ils dispensent l’Autorité de la concurrence d’avoir à apprécier leurs effets réels sur le marché.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN & FRANÇAIS • Sanctions civiles
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
V. Prix imposés
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Procédure
Institué par le règlement 1/2003 et mis en place par la Communication 2004/C 101/03, le réseau européen de la concurrence (REC), ou « European Competition Network (ECN) », regroupe les autorités nationales de concurrence et la Commission dans un réseau d’autorités publiques qui agissent dans l’intérêt général et collaborent étroitement afin de préserver la concurrence. « Forum de discussion et de coopération pour l’application de la politique de la concurrence de l’Union et son contrôle », le REC fournit un cadre dans lequel s’inscrit la coopération des autorités européennes de concurrence dans les affaires où les articles 101 et 102 TFUE sont appliqués, et « constitue le socle sur lequel s’appuie la création et la préservation d’une culture commune de la concurrence en Europe ».
Le REC a pour vocation d’assurer à la fois une division efficace du travail dans un système de compétences parallèles et une application homogène des règles de concurrence de l’Union. La communication précise les critères de répartition des compétences et règle la question de la réattribution des affaires afin que les cas soient traités par l’autorité la mieux placée. Une autorité est bien placée lorsque trois conditions cumulatives sont réunies : l’accord ou la pratique doit produire des effets directs substantiels, actuels ou prévisibles sur son territoire, y être mis en œuvre ou y trouver son origine ; l’autorité doit être à même de faire cesser efficacement l’intégralité de l’infraction ; elle doit être en mesure de réunir, éventuellement avec le concours d’autres autorités, les preuves requises pour démontrer l’infraction. L’efficacité du mécanisme est garantie par un système d’échange d’informations qui impose aux autorités d’informer le réseau dès qu’elles lancent une mesure d’enquête.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
Dans les lignes directrices 2004/C 101/08 concernant l’application de l’article 101, paragraphe 3, TFUE, la Commission définit les restrictions par objet comme celles « qui, au regard des objectifs poursuivis par les règles [européennes] de concurrence, sont tellement susceptibles d’avoir des effets négatifs sur la concurrence, qu’il est inutile, aux fins de l’application de l’article [101, paragraphe 1, TFUE] de démontrer qu’elles ont des effets concrets sur le marché » car elles ont, par nature, la capacité de restreindre le jeu de la concurrence. Selon la Cour de justice, la distinction entre « infractions par objet » et « infractions par effet » tient à la circonstance que certaines formes de collusion entre entreprises révèlent un degré suffisant de nocivité à l’égard de la concurrence pour qu’il puisse être considéré que l’examen de leurs effets n’est pas nécessaire et qu’elles peuvent être considérées, par leur nature même, comme nuisibles au bon fonctionnement du jeu normal de la concurrence.
Relèvent de cette catégorie les « ententes injustifiables »ou « hardcore cartels » visés par la Recommandation de l’OCDE de 1998, c’est-à-dire les accords, pratiques ou arrangements entre concurrents « visant à fixer des prix, procéder à des soumissions concertées, établir des restrictions ou des quotas à la production, ou à partager ou diviser des marchés par répartition de la clientèle, de fournisseurs, de territoires ou de lignes d’activité ». Dans ses lignes directrices, la Commission énumère plusieurs exemples de restrictions par objet : la fixation des prix et le partage du marché, ainsi que les « restrictions caractérisées » interdites par les règlements d’exemption et leurs lignes directrices. La jurisprudence inclut également les échanges d’informations dans cette catégorie, en particulier lorsqu’ils portent sur les stratégies de prix des participants. Selon la Cour de justice, la qualification de restriction par objet doit reposer sur une expérience « suffisamment solide et fiable » qui révèle que le comportement en cause entraîne nécessairement des réductions de la production et des hausses de prix ou aboutit à une mauvaise répartition des ressources au détriment des consommateurs. Néanmoins, même en l’absence d’expérience en la matière, comme pour les pratiques nouvelles telles que les accords de « pay-for-delay » dans le domaine pharmaceutique, le Tribunal de l’Union estime qu’il demeure possible, pour caractériser une restriction par objet, d’effectuer un examen individuel et circonstancié de l’accord au regard de son contenu, de sa finalité et de son contexte.
En présence d’une infraction par objet, l’analyse du contexte économique et juridique dans lequel la pratique s’insère peut se limiter à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à une telle qualification. Cependant, lorsque les parties à un accord se prévalent de ses effets proconcurrentiels, le juge doit en tenir compte, en tant qu’éléments du contexte de cet accord, aux fins de la qualification de « restriction par objet », dans la mesure où ils sont susceptibles de remettre en cause l’appréciation globale du degré suffisamment nocif de la pratique collusoire concernée à l’égard de la concurrence, s’ils sont avérés, pertinents, propres à l’accord et suffisamment importants.
La Commission a expressément exclu les restrictions par objet du champ d’application de la Communication de minimis. Par principe, la restriction par objet est également exclue de l’exemption par catégorie et la Commission estime qu’il est peu probable qu’elle remplisse les conditions de l’article 101, paragraphe 3. Toutefois, elle réserve aux entreprises « la possibilité de démontrer l’existence d’effets favorables à la concurrence en vertu de l’article 101, paragraphe 3, dans un cas donné ».
CONSEILS / DÉCISIONS
Retrouvez bientôt, pour chaque mot-clé :
- tous nos conseils pratiques ;
- nos tableaux statistiques ;
- les dernières décisions clés ;
- les publications récentes ;
- et bien d’autres outils à découvrir.
Plus d’informations : vogel-contact@vogel-vogel.com
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
Certains accords ou pratiques ont par nature la capacité de restreindre la concurrence. Ils sont tellement susceptibles de produire des effets négatifs sur la concurrence qu’il est inutile de démontrer leurs effets concrets ou sensibles. Aussi, lorsqu’il a instauré un seuil de sensibilité, le législateur a-t-il prévu des exceptions en cas d’atteinte à la concurrence particulièrement grave. L’article L. 464-6-2 du Code de commerce dresse, à l’instar des textes européens, une liste de restrictions caractérisées, pour lesquelles la détention par les participants d’une part de marché en deçà du seuil de sensibilité n’empêche par leur poursuite. La jurisprudence qualifie de « restrictions par objet » les pratiques dont l’objet révèle un degré suffisant de nocivité pour qu’il soit inutile d’en rechercher les effets, telles que les ententes de répartition de marchés, les boycotts, les offres de couverture, les stratégies de dénigrement qui visent à retarder l’arrivée sur le marché de médicaments génériques, les pratiques de différenciation tarifaire ou de blocage et de surveillance des importations tendant à empêcher des revendeurs alternatifs de se développer et de faire jouer la concurrence par les prix, les ententes horizontales de prix, les échanges d’informations sur les prix futurs, ainsi que les pratiques verticales d’imposition de prix de revente, d’interdiction des ventes passives ou des exportations ou encore l’exigence d’un diplômé en pharmacie présent sur les lieux de vente pour la commercialisation de produits dermo-cosmétiques. Comme le juge de l’Union, les autorités françaises estiment que la constatation de l’objet anticoncurrentiel d’une entente ne requiert pas la preuve concrète d’un lien direct de la pratique avec les prix supportés par le client final ou les prix à la consommation ou celle de l’existence d’inconvénients pour les consommateurs. Par ailleurs, la possibilité de se référer à la jurisprudence antérieure pour caractériser l’évidence du caractère nocif d’une pratique n’implique pas que celui-ci ait été reconnu par une décision la qualifiant d’infraction par objet, dès lors que les autorités de concurrence ont démontré son caractère nuisible par ses effets auparavant. En outre, en présence d’un type d’accord dont l’expérience et la pratique décisionnelle antérieure attestent de la particulière nocivité, l’Autorité de la concurrence peut limiter son analyse du contexte juridique et économique à ce qui s’avère strictement nécessaire en vue de conclure à l’existence d’une restriction de la concurrence par objet.
Dans certains cas, les autorités de contrôle écartent, cependant, la qualification de restriction par objet même lorsque la pratique porte sur la fixation des prix ou la répartition du marché dès lors qu’elle poursuit un objectif légitime, comme la fourniture de produits et services de qualité à des prix compétitifs.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
En droit européen, la notion de restriction accessoire vise toute restriction qui est directement liée et nécessaire à la réalisation d’une opération principale qui elle-même ne présente pas de caractère anticoncurrentiel. La nécessité s’apprécie de manière objective et implique un contrôle de proportionnalité. Selon la Cour de justice, l’opération principale doit s’avérer impossible et non seulement plus difficilement réalisable ou moins profitable sans la restriction accessoire. Une restriction mise en oeuvre non dans le cadre de l’accord principal ni même à l’occasion de sa conclusion, mais plusieurs années après celle-ci, ne peut donc être considérée comme accessoire.
La durée et le champ d’application matériel et géographique de la restriction ne doivent, en outre, pas excéder ce qui est nécessaire pour la réalisation de l’opération principale. Ainsi, une clause de non-concurrence qui est nécessaire au transfert de la valeur commerciale d’une entreprise ou à la période de démarrage d’une entreprise commune, qui est limitée dans le temps et dans l’espace, constitue une restriction accessoire. En revanche, la restriction de concurrence qui découle d’un système de limitations territoriales nationales n’est ni objectivement nécessaire ni inhérente à la protection des droits d’auteur lorsque d’autres méthodes permettant la concession de licences multirépertoires sont envisageables. De même, une clause de non-concurrence ne peut être qualifiée de restriction accessoire lorsqu’elle subsiste en dépit de la renonciation des parties à la mise en oeuvre de l’opération principale ou n’est pas nécessaire à sa réalisation en raison d’un cadre légal suffisamment protecteur.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
En droit européen, la notion de restriction accessoire vise toute restriction qui est directement liée et nécessaire à la réalisation d’une opération principale qui elle-même ne présente pas de caractère anticoncurrentiel. La nécessité s’apprécie de manière objective et implique un contrôle de proportionnalité. Selon la Cour de justice, l’opération principale doit s’avérer impossible et non seulement plus difficilement réalisable ou moins profitable sans la restriction accessoire. Une restriction mise en oeuvre non dans le cadre de l’accord principal ni même à l’occasion de sa conclusion, mais plusieurs années après celle-ci, ne peut donc être considérée comme accessoire.
La durée et le champ d’application matériel et géographique de la restriction ne doivent, en outre, pas excéder ce qui est nécessaire pour la réalisation de l’opération principale. Ainsi, une clause de non-concurrence qui est nécessaire au transfert de la valeur commerciale d’une entreprise ou à la période de démarrage d’une entreprise commune, qui est limitée dans le temps et dans l’espace, constitue une restriction accessoire. En revanche, la restriction de concurrence qui découle d’un système de limitations territoriales nationales n’est ni objectivement nécessaire ni inhérente à la protection des droits d’auteur lorsque d’autres méthodes permettant la concession de licences multirépertoires sont envisageables. De même, une clause de non-concurrence ne peut être qualifiée de restriction accessoire lorsqu’elle subsiste en dépit de la renonciation des parties à la mise en oeuvre de l’opération principale ou n’est pas nécessaire à sa réalisation en raison d’un cadre légal suffisamment protecteur.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Concentrations
Une concentration peut être accompagnée de restrictions tendant à favoriser sa réalisation, certaines étant appréciées en elles-mêmes et soumises à l’article 101 TFUE ou L. 420-1 du Code de commerce, tandis que d’autres, qualifiées d' »accessoires », sont examinées simultanément à l’opération. Sont considérées comme accessoires, les restrictions qui conditionnent l’opération et qui n’en sont pas détachables, c’est-à-dire toutes les restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation de la concentration et dont l’absence soit empêcherait, soit rendrait aléatoire, la réalisation de l’opération.
Des engagements de non-concurrence peuvent être considérés comme accessoires dans la mesure où ils sont limités dans le temps et dans leur portée géographique, matérielle et personnelle. De même, dès lors qu’elles correspondent aux activités de l’entreprise cédée, les licences de brevets, de droits similaires, de savoir-faire, de marques, de dénominations commerciales, de droits de dessins et modèles, de droits d’auteur ou de droits voisins, qu’elles soient simples, exclusives ou limitées à certaines applications, constituent des restrictions accessoires, à l’exception des stipulations inhérentes à certains accords protégeant plutôt le donneur de licence que le preneur.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
La notion de restriction accessoire vise toute restriction directement liée et nécessaire à la réalisation d’une opération principale elle-même conforme aux règles de concurrence. L’importation en droit français de la théorie des restrictions accessoires, qui constitue une variante de la règle de raison, est récente. Si l’opération principale couverte par l’accord ne restreint pas la concurrence, il n’est pas nécessaire d’examiner la compatibilité des restrictions individuelles contenues dans l’accord. Comme en droit européen, la restriction doit être objectivement nécessaire à l’opération principale, ce qui n’a pas été jugé être le cas s’agissant des commissions multilatérales fixées d’un commun accord entre banques concurrentes pour chaque remise de chèque. Par ailleurs, l’Autorité de la concurrence estime que des restrictions notifiées et autorisées dans le cadre d’une opération de concentration ne peuvent, en application de la théorie des droits acquis, être examinées postérieurement au regard du droit des pratiques anticoncurrentielles.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Concentrations
Les restrictions accessoires à une concentration sont les restrictions de concurrence « directement liées et nécessaires à la réalisation »de la concentration, qui suivent le sort de l’opération principale : selon l’article 6 du règlement 139/2004, la décision qui déclare la concentration compatible est réputée couvrir les restrictions accessoires. La communication 2005/C 56/03 doit permettre aux entreprises d’apprécier si leurs accords revêtent un caractère accessoire. Les restrictions non accessoires relèvent éventuellement des articles 101 ou 102 TFUE. Pour être qualifiée d’accessoire, la restriction doit satisfaire à trois conditions cumulatives :
– Connexité : étroitement liée à la concentration, la restriction doit se rapporter, d’un point de vue économique, à la transaction principale. Elle doit avoir pour objet d’assurer la transition entre l’ancienne et la nouvelle structure de l’entreprise après l’achèvement de l’opération de concentration. Il en est ainsi de l’engagement pris par le vendeur de ne pas apporter de modifications à la conduite de ses affaires eu égard à ses pratiques habituelles, dans l’intervalle compris entre la conclusion de l’accord et la réalisation de la cession ou de la clause de l’accord préparatoire à la création de l’entreprise commune, par laquelle les entreprises fondatrices s’engagent à ne pas effectuer unilatéralement de changements dans la conduite des affaires faisant l’objet de l’opération. Plus généralement, des accords ne sont directement liés à l’opération que s’ils sont finalisés ou conclus au moment de sa soumission à l’appréciation de la Commission.
– Nécessité : en l’absence de la restriction, l’opération ne pourrait pas se réaliser ou s’effectuerait dans de moins bonnes conditions. Les restrictions nécessaires visent en principe à protéger la valeur des biens transférés ou conservés, à maintenir l’approvisionnement ou les débouchés, à faciliter le transfert d’activités ou à permettre le démarrage de la nouvelle entité. En principe, la protection doit bénéficier à l’acquéreur et non au vendeur.
– Proportionnalité : par sa durée et son champ d’application, la restriction ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’opération de concentration. Ainsi, des engagements de non-concurrence ne caractérisent des restrictions accessoires que s’ils sont limités dans le temps, dans l’espace et dans leur portée tant matérielle que personnelle. Les accords de licence, qui accompagnent souvent la réalisation de la concentration, sont en règle générale considérés comme nécessaires et proportionnés, même si leur durée n’est pas limitée. Les accords d’approvisionnement sont, en revanche, plus rarement qualifiés de restrictions accessoires par la Commission, qui refuse de les examiner simultanément à l’opération de concentration.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN & FRANÇAIS • Ententes
Les restrictions caractérisées ou « clauses noires » sont les restrictions de concurrence contenues dans un accord vertical ou horizontal qui par leur gravité entraînent la perte de l’exemption pour l’ensemble de l’accord. S’agissant des accords verticaux, l’article 4 du règlement 330/2010 vise notamment des clauses de prix minimum imposés, des clauses de restriction de clientèle ou de territoire (interdiction des ventes actives ou passives, des ventes croisées dans les systèmes de distribution sélective…). S’agissant des accords horizontaux, l’article 5 du règlement 1217/2010 relatif aux accords de recherche et développement vise notamment les clauses limitant les activités, les clauses de non-contestation, de fixation de prix et de répartition de marchés, tandis que l’article 4 du règlement 1218/2010 relatif aux accords de spécialisation condamne les clauses de prix, de limitation de la production ou des ventes, de répartition de marché et de quotas de produits. Outre la perte du bénéfice de l’exemption, les restrictions caractérisées sont exclues de la communication de la Commission sur les accords d’importance mineure (2014/C 291/01) : elles pourront donc être examinées quelle que soit la part de marché des entreprises.
CONSEILS / DÉCISIONS
Retrouvez bientôt, pour chaque mot-clé :
- tous nos conseils pratiques ;
- nos tableaux statistiques ;
- les dernières décisions clés ;
- les publications récentes ;
- et bien d’autres outils à découvrir.
Plus d’informations : vogel-contact@vogel-vogel.com
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN & FRANÇAIS • Ententes
Les restrictions horizontales découlent généralement d’accords ou pratiques mis en œuvre par des entreprises situées au même stade du processus économique, c’est-à-dire entre concurrents. Ces accords portent les germes d’une entente illicite dans la mesure où ils risquent, du seul fait de leur conclusion, de restreindre la concurrence dès lors qu’ils portent sur des données concurrentielles telles que les prix ou les quantités. C’est la raison pour laquelle ils font l’objet d’une appréciation plus sévère de la part des autorités de concurrence que les accords verticaux, conclus entre des entreprises non concurrentes, qui n’apparaissent pas a priori anticoncurrentiels.
Le degré de gravité de l’atteinte à la concurrence varie selon l’accord en cause. Une ligne directrice se dégage cependant : plus l’intégration entre les parties est forte, plus les chances que leur accord dégage des gains d’efficacité sont grandes. Des accords de prix, de répartition de marché, de boycott, qui constituent des ententes pures et simples, sont donc logiquement jugés beaucoup plus sévèrement que des accords de coopération, en particulier lorsque ceux-ci se traduisent par la création d’une entreprise commune. Selon les lignes directrices de la Commission sur les accords de coopération horizontale (2011/C 11/01), ceux-ci peuvent, même lorsqu’ils ne sont pas anticoncurrentiels par leur objet, limiter le jeu de la concurrence lorsqu’ils empêchent les parties de se concurrencer ou de concurrencer des tiers en tant qu’opérateurs économiques indépendants, réduisent leur autonomie décisionnelle de manière substantielle ou affectent les intérêts financiers des parties jusqu’à réduire sensiblement leur pouvoir de décision. La restriction horizontale peut également avoir pour effet négatif d’entraîner la révélation d’informations stratégiques qui risque d’accroître la coordination entre les parties ou un partage des coûts important qui leur permet de coordonner leurs prix sur le marché et leur production.
La coopération entre concurrents, qui permet souvent aux participants de pénétrer ou de se maintenir sur le marché, représente cependant un moyen de stimuler la concurrence. La Commission a adopté deux règlements d’exemption relatifs aux accords de coopération, le premier relatif aux accords de spécialisation (Règl. 1218/2010), le second aux accords de recherche et de développement (Règl. 1217/2010). Ces textes sont accompagnés de lignes directrices qui doivent permettre aux entreprises d’apprécier la validité de leurs accords si ceux-ci ne relèvent pas des règlements d’exemption, selon une analyse systématique précisément définie qui se déroule en trois temps : (1) vérification de l’existence d’une restriction de la concurrence du fait de l’objet de l’accord, ou à défaut, (2) d’un effet restrictif sensible sur la concurrence, puis (3) appréciation des gains d’efficacité éventuels au titre de l’article 101, paragraphe 3, TFUE. Les autorités nationales sont chargées d’appliquer ces règlements, qui peuvent être directement invoqués devant elles, dès lors que les accords produisent un effet sur le commerce entre États membres. Lorsque leurs conditions d’application ne sont pas remplies, les règlements européens et les lignes directrices ne constituent qu’un guide d’analyse.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
Les restrictions verticales sont les restrictions de concurrence généralement contenues dans les accords verticaux, c’est-à-dire les « accord[s] ou […] pratique[s] concertée[s] entre deux ou plusieurs entreprises opérant chacune, aux fins de l’accord ou de la pratique concertée, à un niveau différent de la chaîne de production ou de distribution, et relatif[s] aux conditions auxquelles les parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services » (Règ. 330/2010, art. 1er, 1°, a). Il s’agit principalement des accords d’approvisionnement exclusif, de distribution exclusive, de distribution sélective, de distribution automobile et de franchise.
Les restrictions verticales sont, sous certaines conditions, couvertes par le règlement général 330/2010 et ses lignes directrices du 19 mai 2010. Pour bénéficier de l’exemption, la part de marché tant du fournisseur que du distributeur ne doit pas dépasser 30 % et l’accord ne doit pas contenir de clauses noires ou « restrictions caractérisées » visées à l’article 4 (clauses de prix minimum ou de prix fixe, clauses conférant une protection territoriale absolue, clauses prohibant les livraisons croisées entre distributeurs sélectifs, etc.). L’article 5 dresse par ailleurs une liste de « restrictions exclues », qui ne sont pas exemptées, mais dont la présence n’affecte pas la validité du reste de l’accord (clause de non-concurrence d’une durée supérieure à cinq ans, …). Au-delà du seuil de 30 %, s’il n’est pas possible de présumer qu’un accord vertical entraîne généralement des avantages objectifs de nature à compenser les inconvénients qui en résultent pour la concurrence, un tel accord ne peut pas non plus être présumé relever du paragraphe 1 de l’article 101 TFUE ou ne pas remplir les conditions du paragraphe 3 (Règl. 330/2010, cons. 9). Par ailleurs, si la présence de restrictions caractérisées au sein d’un accord peut laisser présumer son caractère anticoncurrentiel, cette présomption présente un caractère réfutable (Lignes directrices, pt 47). L’exemption sera accordée s’il est établi que la clause noire produit des gains d’efficacité et que les conditions posées à l’article 101, paragraphe 3, TFUE sont réunies. La prohibition des prix minimum imposés n’est pas absolue. Si les entreprises détiennent plus de 30 % de parts de marché, l’accord ne pourra bénéficier que d’une exemption individuelle. L’exemption est rétroactive et vaut dès la conclusion de l’accord. Lorsque le règlement n’est pas applicable, les lignes directrices doivent permettre aux entreprises de vérifier la compatibilité de leur accord avec les dispositions de l’article 101, paragraphe 1.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
Les restrictions verticales sont les restrictions de concurrence généralement contenues dans les accords verticaux, c’est-à-dire les « accord[s] ou […] pratique[s] concertée[s] entre deux ou plusieurs entreprises opérant chacune, aux fins de l’accord ou de la pratique concertée, à un niveau différent de la chaîne de production ou de distribution, et relatif[s] aux conditions auxquelles les parties peuvent acheter, vendre ou revendre certains biens ou services » (Règ. 330/2010, art. 1er, 1°, a). Les accords verticaux sont considérés avec une certaine indulgence par les autorités de concurrence dans la mesure où, à la différence des accords horizontaux, ils entraînent en principe un accroissement de la concurrence inter-marques. De plus, alors que, dans les relations horizontales, le pouvoir de marché de l’une des entreprises peut inciter ses concurrents à adopter un comportement anticoncurrentiel, dans les relations verticales, il y a en principe neutralisation du pouvoir de marché.
Les accords de distribution (accords d’approvisionnement exclusif, de distribution exclusive, de distribution sélective, de distribution automobile et de franchise) constituent en tant que tels, entre le fournisseur et les membres de son réseau de distribution, des ententes susceptibles d’affecter la concurrence par les clauses qu’ils contiennent ou en raison des conditions dans lesquelles ils sont appliqués. Toutefois, dès son rapport pour l’année 1987, le Conseil de la concurrence [devenu l’Autorité de la concurrence] soulignait que les systèmes de distribution sélective ne sont pas nécessairement contraires aux dispositions de l’article L. 420-1 du Code de commerce. Si la sélection a pour conséquence de limiter le nombre de détaillants admis à commercialiser le produit en cause et peut être de nature à diminuer l’intensité de la concurrence par les prix, elle est également une source de concurrence par la qualité. Au fil des années, l’Autorité de concurrence a adopté une approche souple mettant l’accent sur l’ambivalence des accords de distribution qui réduisent la concurrence entre membres du réseau (concurrence intra-marque), mais augmentent en principe la concurrence entre réseaux (concurrence inter-marques). Ils doivent donc être appréciés au regard du contexte dans lequel ils sont mis en œuvre.
Le règlement restrictions verticales 330/2010 du 20 avril 2010, dont le champ d’application est très large, vise virtuellement tous les accords verticaux, c’est-à-dire tous les accords entre entreprises situées à des niveaux différents de la chaîne de production et de distribution et dont l’objet est l’achat, la vente ou la revente de certains biens et services. Seuls les accords qui sont contraires aux dispositions de l’article 101, paragraphe 1er, TFUE mais qui remplissent avec suffisamment de certitude les conditions d’application de l’article 101, paragraphe 3, sont compris dans la catégorie (art. 2). Le texte pose une présomption de légalité des accords qui ne contiennent pas de restrictions ayant des effets anticoncurrentiels graves lorsque le fournisseur et l’acheteur détiennent chacun une part du marché ne dépassant pas 30 % (art. 3). Les autorités nationales de concurrence étant autorisées par le règlement 1/2003 à retirer le bénéfice de l’application d’un règlement d’exemption par catégorie sur son territoire (art. 29), l’Autorité de la concurrence a pleine compétence pour appliquer le règlement 330/2010 dès lors qu’un accord entre dans son champ d’application. Lorsque les conditions d’application du règlement ne sont pas remplies, notamment lorsque la restriction n’affecte pas le commerce entre Etats membres, elle estime que les règles européennes peuvent servir de guide d’analyse dans le cadre de la règle de raison.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Procédure
La Commission inflige l’amende prévue à l’article 23 du règlement 1/2003 aux entreprises qui ont adopté les pratiques poursuivies ou à celles qui en sont responsables à la date de sa décision. L’imputabilité de l’infraction est source de difficultés lorsque l’entreprise contrevenante a fait l’objet d’une restructuration, c’est-à-dire d’une modification de son organisation structurelle ou de sa forme sociale, depuis la date de commission de l’infraction. La restructuration peut consister en une fusion, une fusion-absorption, une cession de parts, un apport partiel d’actifs…
Selon les autorités de concurrence, l’infraction qui vise l’entreprise, doit, en cas de restructuration de celle-ci, être imputée à l’entité qui assure la continuité économique et fonctionnelle de l’auteur du comportement anticoncurrentiel. L’analyse se décompose en trois étapes. La première consiste à identifier l’entreprise qui a commis l’infraction ; la seconde à vérifier si cette entreprise, à la suite de la restructuration, subsiste ou a été liquidée ; la troisième à déterminer la responsabilité. Si l’entreprise subsiste, elle demeure responsable, sinon l’infraction est imputable à l’entreprise à laquelle ont été transférés les moyens matériels et humains ayant concouru à la commission de l’infraction. Différents cas de figure peuvent se présenter :
– Fusion ou fusion-absorption : l’infraction est imputable à l’entité née de la fusion des deux sociétés qui ont adopté les comportements restrictifs, dès lors qu’elle assure la continuité économique et fonctionnelle de ces entreprises. En cas de fusion-absorption, la société absorbante doit répondre des infractions commises par la société absorbée avant l’opération, même si les actifs qui ont contribué à la réalisation de l’infraction ont préalablement été transférés à un tiers. Lorsque la fusion s’opère entre deux sociétés apparentées, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de l’infraction à la société absorbante sans avoir à rechercher la responsabilité éventuelle de leur société mère.
– Fusion-scission : en cas de scission d’une entreprise membre de l’entente, les sociétés nées de la scission qui continuent de gérer ses unités de production sont solidairement responsables avec l’entreprise du paiement de l’amende jusqu’à sa mise en liquidation, dès lors qu’elles constituent une unité économique.
– Cession : le droit d’agir contre une société sur le fondement des règles de concurrence n’est pas éteint du seul fait de l’acquisition de ses actions par un tiers. La responsabilité du cessionnaire est écartée si, à la date de la décision, l’auteur de l’infraction continue d’exister juridiquement. La règle s’applique aussi bien à la cession totale d’une entreprise qu’à celle d’une branche d’activité. Toutefois, même si l’entreprise initiale subsiste, la société qui a repris l’ensemble de ses activités dans le secteur concerné par des pratiques anticoncurrentielles, est réputée en assurer la continuité économique lorsque les deux sociétés sont unies par des liens structurels. Tel est le cas lorsque, au moment de l’infraction, les deux entités sont détenues intégralement par la même société, qui exerce effectivement une influence déterminante sur elles. Le caractère public ou privé de la société contrôlante est indifférent. La Commission n’est pas tenue de rechercher la responsabilité éventuelle de la société mère mais peut imputer l’infraction au seul cessionnaire. A l’inverse, la Commission n’est pas tenue d’imputer l’infraction commise par la filiale au groupe acquéreur tiers, lorsque la société mère responsable continue d’exister juridiquement et économiquement. Elle n’est pas non plus tenue de répartir le montant de base de l’amende entre le cédant et le cessionnaire lorsque la cession a eu lieu au milieu de la période infractionnelle, dès lors que la gravité de l’infraction ne doit pas nécessairement être appréciée eu égard à l’impact réel du comportement de chaque entreprise sur la concurrence. Selon la jurisprudence, la date pertinente pour apprécier, afin d’établir l’existence d’une situation de continuité économique, si le transfert d’activités a lieu à l’intérieur d’un groupe ou entre entreprises indépendantes, doit être celle du transfert et non celle de l’adoption de la décision qui sanctionne l’infraction. Dès lors, il importe peu que les liens structurels entre les entreprises aient été de courte durée, comme dans l’hypothèse où l’entité cessionnaire a été créée et a reçu les actifs en vue d’une cession ultérieure à un tiers indépendant.
– Transformation : le changement de forme ou de dénomination d’une entreprise n’a pas pour effet de créer une nouvelle entité dégagée de la responsabilité des comportements anticoncurrentiels adoptés par la précédente.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Procédure
L’imputabilité de l’infraction est source de difficultés lorsque l’entreprise contrevenante a fait l’objet d’une restructuration, c’est-à-dire d’une modification de sa organisation structurelle ou de sa forme sociale, entre la date de commission de l’infraction et celle où l’Autorité de la concurrence statue. La notion d’entreprise étant purement économique, c’est, en principe, l’entité qui assure la continuité économique et fonctionnelle de l’auteur du comportement anticoncurrentiel qui doit répondre de celui-ci. L’Autorité imputera l’infraction à l’entreprise à laquelle ont été transférés les moyens matériels et humains qui ont concouru à la commission de l’infraction, à moins qu’à la date de la décision, l’auteur de l’infraction continue d’exister juridiquement. Plusieurs cas de figure peuvent se présenter :
– fusion ou fusion-absorption : selon l’article L. 236-1 du Code de commerce, cette opération emporte transmission universelle du patrimoine. L’ensemble des moyens humains et matériels ayant concouru à la commission de l’infraction sont transférés à la société absorbante, qui doit se voir imputer la responsabilité, même si, à la date de l’opération, la société absorbée avait cédé une partie de ses actifs à des tiers. En cas de fusion par création d’une entité nouvelle, la responsabilité des pratiques anticoncurrentielles incombe à l’entreprise ou à l’organisation professionnelle issue de l’opération.
– Cession ou apport de fonds de commerce : l’entreprise qui succède, à la suite d’une cession ou de l’apport d’un fonds de commerce, à celle qui a commis l’infraction aux règles de concurrence en est responsable dès lors qu’il existe une continuité économique et fonctionnelle entre elles. La solution est différente lorsqu’à la date où l’Autorité de la concurrence statue, la personne morale support de l’entreprise existe toujours ou encore lorsque l’entreprise cédée est exploitée en nom personnel par une personne physique.
– Location-gérance : ce contrat, par lequel le propriétaire d’un fonds de commerce en concède la location à un gérant qui l’exploite « à ses risques et périls » (C. com., art. L. 144-1), n’a d’autre effet que de substituer un tiers à l’exploitant du fonds, sans faire disparaître l’entreprise. La continuité économique et fonctionnelle n’étant pas altérée, le locataire-gérant assume la responsabilité des pratiques anticoncurrentielles mises en œuvre par l’entreprise prise en gérance.
– Plan de cession : dans la mesure où le cessionnaire assure la continuité économique et fonctionnelle de l’entreprise originaire, sa responsabilité doit être mise en cause en dépit du fait qu’il n’ait pris aucune part aux pratiques anticoncurrentielles et ne les ait pas poursuivies postérieurement à la cession. Il peut dès lors être destinataire de la notification des griefs et être obligé de se conformer à une injonction de ne pas faire, mais ne pourra se voir infliger de sanction pécuniaire, en vertu de l’article L. 626-10 du Code de commerce.
– Transfert du contrôle : la modification dans la composition du capital de l’entreprise qui a participé à une entente n’a pas d’incidence sur l’imputabilité de la sanction. De fait, les sujets du droit de la concurrence sont les entreprises, non les hommes qui les dirigent. Néanmoins, se fondant sur l’existence d’une entité unique, la Cour de cassation a pu retenir qu’une entreprise qui avait pris le contrôle d’un participant à l’entente après la cessation de l’infraction pouvait se voir imputer celle-ci et imposer un calcul de l’amende sur le fondement de son chiffre d’affaires mondial consolidé hors taxes.
– Transformation : la transformation d’une société en holding ou d’une association en syndicat n’affecte pas sa continuité économique et fonctionnelle. En revanche, l’association constituée par d’anciens membres d’une autre association ne peut se voir imputer les pratiques reprochées à celle-ci dans la mesure où l’auteur de l’infraction continue d’exister.
– Liquidation judiciaire : une fois sortie du marché, une entreprise n’est plus sujet du droit de la concurrence. Toutefois, si elle continue d’exister juridiquement, même pour les besoins de sa liquidation, elle doit répondre des pratiques anticoncurrentielles qu’elle a mises en œuvre. En revanche, elle n’encourra pas de sanction pécuniaire (C. com., art. L. 622-21 et L. 622-23).
– Dissolution : une sanction ne peut être prononcée que tant que la personnalité morale de l’entreprise qui a commis l’infraction subsiste. Une fois les opérations de liquidation clôturées, l’entreprise ne peut plus faire l’objet d’une amende. En revanche, à défaut de clôture de ces opérations, l’Autorité de la concurrence peut valablement infliger une sanction pécuniaire à la société dissoute, celle-ci n’étant pas transmissible à l’entreprise qui en a éventuellement pris le contrôle. La dissolution peut également être accompagnée du transfert de l’activité de l’entreprise dissoute à une autre. Dans ce cas, le principe de la continuité économique et fonctionnelle permet d’infliger la sanction à l’entreprise repreneuse. Il faut et il suffit que l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes de l’auteur de la pratique ait été repris par celle-ci.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
Les rétrocessions consistent en des ventes croisées entre distributeurs d’un même réseau. L’interdiction des rétrocessions est par nature restrictive de concurrence car elle limite la concurrence intramarque, contrecarrant par là même l’objectif de réalisation du marché intérieur. Lorsque la distribution exclusive n’est pas combinée à la distribution sélective, l’interdiction des rétrocessions enfreint le principe de liberté des ventes des distributeurs. Lorsque le système de distribution est à la fois exclusif et sélectif, elle est contraire au principe de liberté des rétrocessions entre membres du réseau inhérente à la distribution sélective. Le règlement restrictions verticales 330/2010 qualifie l’interdiction des rétrocessions entre distributeurs sélectifs de restriction caractérisée (art. 4, d). La clause qui n’interdit expressément que les ventes passives à des distributeurs non agréés, mais qui est comprise par les distributeurs comme s’appliquant plus généralement à toute vente, y compris aux autres revendeurs agréés ou au consommateur final, présente un objet anticoncurrentiel, car elle limite les sources d’approvisionnement des distributeurs exclusifs et fait obstacle aux livraisons croisées.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
Les rétrocessions consistent en des ventes croisées entre distributeurs d’un même réseau. L’interdiction des rétrocessions est par nature restrictive de concurrence car elle limite la concurrence intramarque. La jurisprudence estime donc que les clauses de non-rétrocession dans les contrats de franchise, de distribution exclusive ou de distribution sélective sont contraires à l’article L. 420-1 du Code de commerce. Les clauses d’approvisionnement exclusif qui ont le même objet ou le même effet tombent également sous le coup de la prohibition.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN • Ententes
La prise de contact qui caractérise l’existence d’une pratique concertée peut notamment se réaliser au cours de réunions entre concurrents. La participation à une réunion ne constitue pas en soi une pratique illicite. Il suffit cependant que l’objet de la réunion soit anticoncurrentiel pour qu’une pratique concertée puisse être constatée. Tel est le cas lorsque la réunion traduit la volonté commune des entreprises en cause de se comporter sur le marché d’une manière déterminée, influence le comportement de chacun sur le marché et dévoile le comportement que chaque producteur envisage d’adopter. Il en va de même de la réunion au cours de laquelle aucun accord n’a été conclu, mais un accord préalable évoqué. La faiblesse du nombre de réunions entre les entreprises concernées ne constitue pas un élément déterminant. Il n’est pas nécessaire, pour qualifier une entreprise de partie à l’entente, qu’elle ait activement participé aux réunions, ni que celles-ci soient suivies d’effet, car seule une distanciation publique du contenu des rencontres peut permettre à une entreprise de s’exonérer de sa responsabilité. En effet, l’entreprise présente à des réunions, qui ne s’en distancie pas publiquement, est responsable de l’infraction, car elle laisse penser qu’elle souscrit à l’objet des discussions et se comportera en conséquence. La notion de distanciation publique s’interprète restrictivement : le fait de ne pas se conformer au résultat de réunions à caractère manifestement anticoncurrentiel ou de donner des instructions internes indiquant la volonté de l’entreprise de ne pas s’aligner sur ses concurrents, de coopérer de manière moins visible et d’espacer les contacts, d’utiliser l’entente à son profit en ne respectant pas pleinement les prix convenus, ne constituent pas des preuves de distanciation.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Ententes
Traditionnellement, la participation à une réunion entre concurrents ayant pour objet de fixer des prix n’était pas une preuve suffisante d’entente en droit français et seule la présence à une réunion ultérieure ou un alignement de prix permettait d’inférer l’existence d’une collusion. L’Autorité de la concurrence a ensuite distingué entre les réunions qui se tenaient dans le cadre statutaire d’une organisation professionnelle et les réunions informelles entre concurrents. Dans le premier cas, la jurisprudence traditionnelle continuait de s’appliquer : une entreprise adhérait à une entente de prix décidée lors d’une réunion en cas de diffusion ou d’application concrète des consignes syndicales si, présente à une première réunion, elle participait à une réunion ultérieure ayant le même objet anticoncurrentiel. La solution était justifiée par l’idée que l’entreprise régulièrement convoquée à une réunion syndicale ne pouvait soupçonner son objet anticoncurrentiel. Dans le second cas, les autorités françaises de concurrence appliquaient, en revanche, le même standard de preuve que les autorités européennes : la participation à une seule réunion, même passive, suffisait à prouver l’adhésion de l’entreprise concernée à l’entente. Lorsque l’article 101 TFUE est simultanément applicable à la pratique, l’Autorité estime désormais que la participation d’une entreprise à une seule réunion, statutaire ou non, établit son adhésion aux pratiques. L’entente est constituée dès lors que la participation reflète l’adhésion à une action collective. Si la participation à une seule réunion permet de caractériser l’adhésion de l’entreprise à l’entente, elle ne permet pas retenir sa participation à l’infraction jusqu’à son terme, même en l’absence de distanciation publique, lorsque, après cette réunion, la pratique se poursuit pendant plusieurs années sans qu’elle assiste aux autres réunions collusoires et sans autre manifestation de la poursuite du comportement anticoncurrentiel de sa part.
L’entreprise dont le dirigeant participe à l’une des réunions informelles s’étant tenues entre entreprises concurrentes doit soit refuser d’y participer, soit, si sa bonne foi est surprise, se distancier sans délai et publiquement du mécanisme anticoncurrentiel dont la réunion est le support. Le fait que l’entreprise qui participe à des échanges d’informations ait déjà arrêté sa position et déterminé son propre taux de hausse tarifaire n’enlève rien à l’intérêt stratégique des données reçues des autres participants ni à sa qualité de participant à l’entente, dès lors qu’elle a assisté aux réunions litigieuses et est restée présente sur le marché. De même, la fourniture d’informations sensibles sur sa propre politique à ses concurrents, même si celles-ci traduisent son choix d’adopter un comportement différent de celui de ces derniers caractérise la participation de l’entreprise à l’entente, dès lors qu’un tel comportement ne s’identifie pas à une distanciation publique. Le départ prématuré d’une réunion ne traduit pas davantage une distanciation publique à l’égard de son objet anticoncurrentiel dès lors que le représentant de l’entreprise a communiqué des informations secrètes sur sa stratégie avant de partir. Au-delà, un alignement sur un comportement qu’elle sait concerté manifesterait une adhésion suffisante pour que l’entreprise concernée puisse être considérée comme partie à l’entente.
CONCURRENCE • droit français • Pratiques restrictives
Le droit français prohibe la revente à perte, c’est-à-dire la revente d’un produit à un prix inférieur à son prix d’achat effectif, depuis la loi du 2 juillet 1963 pour au moins deux raisons. D’une part, elle offre une image déformée de la concurrence aux consommateurs, car le commerçant cherche à accréditer l’idée qu’il pratique des marges réduites, alors qu’il s’est fixé comme objectif de détourner la clientèle de ses concurrents. D’autre part, la revente à perte ne bénéficie pas forcément aux consommateurs, car, bien souvent, la réduction des marges sur la vente d’un produit s’accompagne d’une majoration abusive des prix d’autres produits. Aussi, le fait, pour tout commerçant, de revendre ou d’annoncer la revente d’un produit à un prix inférieur à son prix d’achat effectif est-il aujourd’hui interdit par l’article L. 442-5 (ancien art. L. 442-2) du Code de commerce.
Comme l’OCDE, qui prône sa suppression en raison de son manque d’efficacité, le droit de l’Union semble peu favorable à l’interdiction générale de la revente à perte lorsqu’elle vise le consommateur. Dans deux arrêts fondés sur la directive 2005/29 relative aux pratiques commerciales déloyales, la Cour de justice a déclaré contraire au droit de l’Union les législations belge et espagnole, très proches de la loi française, qui instauraient une interdiction générale d’offrir à la vente ou de vendre des biens à perte assortie d’exemptions ne correspondant pas au critères de la déloyauté posés par la directive. La solution n’est cependant transposable au droit français qu’à la condition de considérer que celui-ci poursuit au moins partiellement un objectif de protection du consommateur, ce qui est débattu. Quelle que soit la solution apportée à cette question, on ne peut que constater que ce délit est tombé en déshérence : depuis de longues années, rares sont les décisions rendues sur le fondement de l’ancien article L. 442-2.
L’interdiction concerne « tout commerçant », sans distinction. Tous les opérateurs qui achètent pour revendre sont soumis à la réglementation sur la revente à perte et notamment les importateurs, les grossistes et les détaillants. En revanche, sont exclues du champ de la prohibition les activités de production et de services, qui sont toutefois soumises à l’interdiction de pratiquer des prix abusivement bas (C. com., art. L. 420-5) ou des prix prédateurs constitutifs d’un abus de position dominante (art. L. 420-2). La qualité de l’utilisateur final est sans incidence sur la qualification : il peut s’agir d’un consommateur, d’un professionnel ou d’une société du même groupe.
La prohibition concerne tous les produits revendus ou offerts à la revente en l’état, c’est-à-dire sans avoir subi de transformation. Les éventuelles opérations d’intermédiation doivent ainsi être exclusives de toute transformation. La transformation doit être effective. Certaines opérations comme le découpage ou le tranchage sont très certainement une transformation. En revanche, le doute est permis s’agissant de la décongélation ou du reconditionnement. De même, la simple adjonction d’une carte à puces dans un téléphone portable par un revendeur constitue selon l’Administration une transformation significative du produit qui exclut la qualification de revente en l’état.
Un produit est revendu ou offert à perte lorsque son prix est inférieur à son prix d’achat effectif. Il convient de tenir compte non pas du prix d’achat moyen auprès des fournisseurs, mais du prix d’achat par lot. Lorsque l’offre commerciale combine une prestation de services et la vente d’un produit, elle constitue un tout indivisible, même si, pour les besoins de la publicité, un prix individualisé est artificiellement annoncé. Enfin, le seuil de revente à perte doit être calculé à partir d’un prix d’achat effectif et non projeté, c’est-à-dire déterminé à partir d’extrapolations tirées de la progression du chiffre d’affaires entre une centrale et ses fournisseurs au cours de l’année écoulée. Le prix d’achat effectif est défini comme le prix unitaire net figurant sur la facture d’achat, minoré du montant de l’ensemble des autres avantages financiers consentis par le vendeur (rémunération des services de commercialisation et des ristournes hors facture) exprimé en pourcentage du prix unitaire net du produit et majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques afférentes à cette revente et du prix du transport. Le seuil de revente à perte ne comprend pas les frais annexes facturés aux clients par l’opérateur, tels que le port ou la préparation, s’il n’est pas établi qu’ils correspondent à des prestations indivisibles de la vente du produit. En outre, l’article L. 442-5, I, alinéa 3, autorise les grossistes à vendre avec un coefficient de 0,9 aux détaillants, pour permettre à ces derniers de concurrencer la grande distribution. Le « coefficient grossiste » profite « au grossiste qui distribue des produits ou services exclusivement à des professionnels qui lui sont indépendants et qui exercent une activité de revendeur au détail, de transformateur ou de prestataire de service final ». Est indépendante, au sens de la loi, « toute entreprise libre de déterminer sa politique commerciale et dépourvue de lien capitalistique ou d’affiliation avec le grossiste », ce qui exclut les affiliés d’une centrale d’achats lorsque les liens réciproques créés par le contrat d’affiliation dépassent largement les obligations qui unissent un grossiste et ses clients et privent ces derniers de toute autonomie commerciale. Enfin, la loi EGalim du 30 octobre 2018 a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure pour prévoir, pendant une période de deux ans, le relèvement du seuil de revente à perte de 10 % pour les denrées alimentaires et les produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie, revendus en l’état aux consommateurs. L’article 2 de l’ordonnance adoptée le 12 décembre 2018 dispose à cet effet que « [l]e prix d’achat effectif défini au deuxième alinéa de l’article L. 442-2 du Code de commerce est affecté d’un coefficient de 1,10 ». Ce relèvement est limité au périmètre des produits alimentaires et des produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie. Il vise à assurer de meilleures conditions de négociation pour les fournisseurs, de manière à atténuer la pression sur les prix de leurs propres fournisseurs. La date d’entrée en vigueur du nouveau seuil de revente à perte a été fixée au 1er février 2019 par le décret 2018-1304 du 28 décembre 2018.
Sept exceptions à l’interdiction ont été posées par le législateur. Cette liste est limitative :
– exception d’alignement, qui permet au distributeur de produits alimentaires commercialisés dans un magasin d’une surface de vente de moins de 300 mètres carrés et de produits non alimentaires commercialisés dans un magasin d’une surface de vente de moins de 1 000 mètres carrés, d’aligner son prix de revente sur le prix légalement pratiqué pour les mêmes produits par un autre commerçant dans la même zone d’activité ;
– revente à perte de produits dont la vente présente un caractère saisonnier marqué, pendant la période terminale de la saison des ventes et dans l’intervalle compris entre deux saisons de vente ;
– revente à perte de produits qui ne répondent plus à la demande générale en raison de l’évolution de la mode ou de l’apparition de perfectionnements techniques ;
– revente à perte de produits, aux caractéristiques identiques, dont le réapprovisionnement s’est effectué en baisse, le prix effectif d’achat étant alors remplacé par le prix résultant de la nouvelle facture d’achat ;
– ventes volontaires ou forcées motivées par la cessation ou le changement d’une activité commerciale ;
– revente à perte de produits périssables à partir du moment où ils sont menacés d’altération rapide à condition que l’offre de prix réduit ne fasse l’objet d’une quelconque publicité ou annonce à l’extérieur du point de vente ;
– revente à perte de produits soldés mentionnés à l’article L. 310-3 du Code de commerce.
Tant la revente à perte que l’annonce d’une telle revente sont sanctionnées. Les personnes physiques encourent une amende de 75 000 euro, qui peut être portée à la moitié des dépenses de publicité dans l’hypothèse où l’offre de prix réduit a fait l’objet d’une annonce publicitaire ; la cessation de l’annonce publicitaire peut être ordonnée par le juge d’instruction ou par le tribunal saisi des poursuites, soit sur réquisition du ministère public, soit d’office. De plus, le prévenu de revente à perte peut être condamné à une peine de publication et d’affichage de la décision. Les personnes morales encourent, outre une amende qui peut s’élever au quintuple de celle infligée aux personnes physiques (C. pén., art. 131-38), la peine d’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique, conformément au 9º de l’article 131-39 du Code pénal (C. com., art. L. 442-5, III). La revente à perte peut en outre faire l’objet de la procédure de transaction prévue aux articles L. 470-4-1 et R. 470-5 et suivants du Code de commerce. Enfin, l’incrimination pénale de revente à perte n’exclut pas l’exercice d’une action en concurrence déloyale, car elle constitue un moyen d’éliminer les concurrents du marché et constitue une violation fautive d’une prescription légale.
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Concurrence déloyale
Constitue une revente hors réseau la commercialisation de produits qui font l’objet d’un réseau de distribution par un revendeur non agréé. Selon une jurisprudence constante, le fait de commercialiser des produits hors réseau ne constitue pas en soi un acte de concurrence déloyale, dès lors que l’approvisionnement du revendeur est régulier. Un tiers au réseau peut donc satisfaire des commandes avec des produits acquis régulièrement, même en connaissance de l’exclusivité ou de l’agrément dont bénéficie le distributeur.
Les ventes hors réseau, qui se traduisent souvent par des importations parallèles, constituent un facteur de décloisonnement du marché et, à ce titre, bénéficient de la faveur des autorités de concurrence comme des juridictions judiciaires. Elles cessent en revanche d’être considérées avec indulgence lorsqu’elles constituent des ventes parasites effectuées par des revendeurs hors réseau qui profitent des investissements de la marque sans en supporter les coûts, ni assurer le service au consommateur. Ces revendeurs, qui n’assument pas les mêmes charges, peuvent vendre les produits contractuels à meilleur prix que les membres du réseau, ce qui à terme risque d’entraîner la disparition de ces derniers. Ainsi, l’article 1240 du Code civil trouve à s’appliquer dès lors qu’il peut être relevé à l’encontre du tiers revendeur une faute détachable de la vente. Tel est le cas de la commercialisation effectuée dans des conditions dévalorisantes (vente de produits de luxe dans des hangars, exposés en vrac ou dans des agencements modestes, à proximité d’articles bas de gamme) ou qui portent atteinte à l’image de marque des produits en cause.
Outre l’article 1240 du Code civil, l’article L. 442-6, I, 6º du Code de commerce prohibe la participation directe ou indirecte à la violation d’une interdiction de revente hors réseau, dès lors que l’interdiction en cause est conforme au droit de la concurrence, ce qui limite l’applicabilité du texte aux accords dont la licéité serait la conséquence d’une exemption. Néanmoins, la règle sur la tierce complicité de violation du réseau n’apporte aucune sécurité supplémentaire par rapport à la jurisprudence qui condamne les tiers extérieurs au réseau pour concurrence déloyale ou usage illicite de marque.
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN & FRANÇAIS • Ententes
Constitue une revente hors réseau la commercialisation de produits qui font l’objet d’un réseau de distribution par un revendeur non agréé. Le droit de l’Union se montre très favorable à la revente hors réseau car elle se traduit souvent par des importations parallèles, qu’il considère comme un facteur de décloisonnement du marché. L’interdiction de la revente hors réseau n’est donc admise que dans le cadre des systèmes de distribution sélective, où elle permet de garantir l’étanchéité du réseau (Règl. 330/2010, art. 1er, 1°, e).
CONCURRENCE • DROIT EUROPÉEN & FRANÇAIS • Numérique
Après l’adoption des règlements sur la libre circulation des données à caractère personnel et sur la cybersécurité, de la directive relative aux données ouvertes et du règlement général sur la protection des données, la construction de l’Europe du numérique se poursuit. Lors de la présentation de sa stratégie en matière de données et d’intelligence artificielle, le 19 février 2020, la Commission a fait part de son intention de réaliser un marché unique des données, doté d’un cadre réglementaire pour la gouvernance, l’accessibilité et la réutilisation des données, entre entreprises, entreprises et administrations, ou au sein même des administrations, ainsi que de faciliter l’élaboration d’infrastructures de nouvelle génération permettant d’exploiter tout le potentiel de l’économie des données.
Le droit de la concurrence doit également répondre aux enjeux du numérique : l’essor de plateformes numériques mondiales qui proposent des services d’intermédiation dans la vie quotidienne des consommateurs et des entreprises ainsi que l’avènement de nouveaux développements numériques aux fonctionnalités surpuissantes (cloud, algorithmes, machine learning, blockchain) réalisent une véritable révolution numérique qui impose aux autorités de contrôle d’adapter la mise en œuvre du droit de la concurrence – comme en témoigne la prochaine révision de la communication de 1997 sur le définition du marché pertinent annoncée par la Commission -, voire à le repenser ou le compléter, comme l’attestent les propositions de l’autorité française de concurrence dans sa contribution au débat sur la politique de la concurrence et les enjeux numériques du 21 février 2020, d’élargir la notion de » position dominante « , de redéfinir celle » d’ infrastructure essentielle » ou d’introduire de nouvelles dispositions spécifiques aux » plateformes numériques structurantes « .
CONCURRENCE • DROIT FRANÇAIS • Pratiques restrictives
L’article L. 442-1, II (ancien art. L. 442-6, I, 5º) du Code de commerce sanctionne la rupture brutale, même partielle, d’une relation commerciale établie, sans préavis écrit suffisant. Alors qu’à l’origine, elle était destinée à lutter contre la pratique des déréférencements abusifs de certains distributeurs, la disposition a été rédigée en des termes si généraux qu’elle a pu être appliquée à l’ensemble des relations commerciales. Elle légalise la nécessité de respecter un délai de préavis raisonnable qui tienne compte de la durée des relations antérieures et d’autres facteurs tels que la dépendance éventuelle de la victime et ses facultés de reconversion. L’incrimination couvre la quasi-totalité des professionnels, que la relation soit formalisée ou non, et même les contrats à durée déterminée. Le texte réserve néanmoins une faculté de rupture immédiate en présence d’un cas de force majeure ou d’une inexécution contractuelle. Allant plus loin, la jurisprudence exige la commission d’une faute grave. Depuis l’ordonnance du 24 avril 2019, en cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois. Le non-respect du préavis est sanctionné par une indemnité couvrant la marge perdue au cours de la durée du préavis qui aurait dû être accordée.
Pour autant, le droit commun de la rupture des relations commerciales établies ne déroge pas aux règles spéciales prévoyant des délais de préavis. Il en va ainsi des contrats-types de transport public de marchandises, des contrats d’agence commerciale, des crédits bancaires, des baux commerciaux, ainsi que des relations entre les associés coopérateurs et les coopératives. En outre, la jurisprudence reconnaît aux partenaires la faculté de transiger sur les modalités de la rupture et de son indemnisation.
Une relation commerciale présente un caractère établi lorsqu’elle s’inscrit dans la durée et la continuité et se manifeste par une progression constante du chiffre d’affaires réalisé entre les partenaires ou du moins un volume d’affaires significatif. Des relations de quelques mois ou des commandes ponctuelles ne suffisent pas à former une relation commerciale établie. En revanche, l’absence d’écrit ne remet pas en cause l’existence d’une relation commerciale établie. De même, économique et non juridique, la notion de relation commerciale établie peut concerner une succession de contrats à durée déterminée, ou les échanges maintenus entre les partenaires après l’expiration de leur contrat.
Une relation commerciale peut être précarisée par le recours systématique aux appels d’offres avant chaque commande de produits ou de prestations, même si le même opérateur est toujours sélectionné, ou par la stipulation de restrictions contractuelles à la reconduction d’une relation à durée déterminée, comme la nécessité de constater les prestations effectuées et de signer un avenant plusieurs mois avant l’échéance ou de parvenir à un accord sur les tarifs de l’année à venir.
La rupture brutale de relations commerciales établies peut être totale ou partielle. La rupture ne présente qu’un caractère partiel lorsqu’elle laisse subsister un courant d’affaires entre les partenaires. Une chute importante du volume d’affaires réalisé entre deux partenaires commerciaux entre ainsi dans les prévisions du texte. Cependant, l’article L. 442-1, II ne s’applique pas lorsque la baisse des commandes est justifiée par les difficultés financières du client ou ne résulte pas d’une stratégie volontaire de sa part mais de sa propre baisse d’activité, qu’il ne fait que répercuter sur son fournisseur. La Cour de cassation estime que la crise économique du secteur dans lequel intervient le client peut justifier une diminution de ses commandes. La réduction du périmètre d’intervention d’un prestataire ou la perte d’une exclusivité sont également assimilées à une rupture partielle de relations commerciales établies.
L’article L. 442-1 prévoit que l’auteur d’un abus de dépendance, et notamment de la rupture brutale de relations commerciales établies, engage sa responsabilité. En outre, comme pour tous les manquements à l’article L. 442-1, l’auteur d’une brusque rupture s’expose à une amende civile d’un montant de 5 millions d’euro qui peut être portée au triple du montant des avantages indûment perçus ou à 5 % du chiffre d’affaires réalisé en France par l’auteur des pratiques lors du dernier exercice clos depuis l’exercice précédent celui au cours duquel les pratiques en cause ont été mises en oeuvre.