CONCURRENCEDROIT EUROPÉENEntentes

La protection territoriale absolue est la protection accordée à un distributeur contre toute forme de concurrence sur son territoire. Elle est garantie par diverses interdictions ou mécanismes, telles que la prohibition des ventes actives, qui interdit aux autres membres du réseau de prospecter, de leur propre initiative, le territoire d’un distributeur, la prohibition des ventes passives, qui interdit à un distributeur de répondre aux sollicitations de consommateurs établis à l’extérieur de son territoire, la lutte contre les importations parallèles de produits contractuels en provenance d’autres Etats membres assurée par des interdictions d’exporter ou encore le géo-blocking, qui consiste à bloquer les transactions en ligne émanant de consommateurs établis dans d’autres Etats membres. Les autorités de concurrence se montrent hostiles à l’égard de la protection territoriale absolue, qui réduit la concurrence intra-marque et cloisonne les marchés.

L’article 4 du règlement restrictions verticales 330/2010 qualifie de restrictions caractérisées les stipulations qui ont pour objet de restreindre le territoire sur lequel, ou la clientèle à laquelle, un acheteur partie à l’accord, peut vendre les biens ou services contractuels. Quatre exceptions sont néanmoins prévues, qui concernent les clauses visant à : i) restreindre les ventes actives sur un territoire ou à une clientèle que le fournisseur s’est exclusivement réservés ou qu’il a alloués à un autre acheteur, lorsque cette restriction ne limite pas les ventes réalisées par les clients de l’acheteur ; ii) restreindre les ventes aux utilisateurs finals par un acheteur agissant en tant que grossiste sur le marché ; iii) restreindre les ventes par les membres d’un système de distribution sélective à des distributeurs non agréés, dans le territoire réservé par le fournisseur pour l’opération de ce système, et iv) restreindre la capacité de l’acheteur de vendre des composants destinés à l’incorporation à des clients qui pourraient les utiliser pour la fabrication de biens analogues à ceux qui sont produits par le fournisseur. L’article 4 interdit également les clauses qui restreignent les ventes actives ou les ventes passives aux utilisateurs finals par les membres d’un système de distribution sélective qui agissent en tant que détaillants sur le marché.

Le juge de l’Union estime qu’un accord d’exclusivité est anticoncurrentiel lorsqu’il a pour effet de cloisonner le marché, notamment par sa combinaison avec une législation nationale qui considère comme un acte de concurrence déloyale le fait pour un tiers de se livrer à des importations parallèles. De même, la clause par laquelle le fournisseur réserve sa garantie fabricant aux seuls produits acquis par les clients de ses concessionnaires exclusifs, à l’exclusion des produits commercialisés par le biais d’importateurs parallèles, est restrictive de concurrence. Néanmoins, la clause par laquelle le distributeur exclusif s’engage, en cas de vente en dehors de son territoire, à payer une commission de service après-vente au distributeur territorialement compétent, dont le montant est convenu entre eux et, à défaut, déterminé par le fabricant sur la base de critères objectifs correspondant à une évaluation réaliste du coût du service, ne tombe pas sous le coup de l’article 101 TFUE. Les autorités de contrôle adoptent une approche finaliste, portée davantage sur l’effet de la clause contractuelle que sur son objet, ce qui leur permet d’appréhender aussi des restrictions indirectes. Ainsi, un contrat de distribution exclusive qui ne comporte aucune interdiction de réexportation peut constituer une entente anticoncurrentielle lorsque les parties se concertent afin de restreindre les importations parallèles destinées à un revendeur non agréé. En matière de distribution automobile, des mesures telles que le contingentement des livraisons estimées au territoire du concessionnaire, une politique de primes défavorisant les ventes à l’exportation à des consommateurs finals ou à des concessionnaires situés à l’étranger, ou les pressions exercées sur les concessionnaires pour qu’ils cessent les exportations, sont jugées comme de graves entorses au droit de la concurrence.