Pour Joseph Vogel, la décision des juges des référés du tribunal de commerce de Paris ordonnant à PSA
de reprendre l’exécution normal du contrat de distributeur PR (dopra) de la plateforme de Lorient (groupe Hory) qu’elle avait résilié pour revente hors réseau est « un inquiétant retour en arrière ».

Ma Pièces Auto Bretagne, société du groupe Midi Auto (groupe Hory) a signé les 22 mai et 20 juillet 2017 un contrat de « distributeur officiel de pièces de rechange, équipements et accessoires » (Dopra) avec le groupe PSA pour la distribution des pièces de rechange des marques Peugeot, Citroën, DS et Eurorepar.

Le litige porte sur la vente de pièces d’origine par la société Ma Pièces Auto Bretagne auprès de la société Autopuzz (autre filiale du groupe Midi Auto) qui les recommercialise à des professionnels en dehors du réseau officiel, ce qui selon PSA est en contravention avec le contrat de distributeur officiel (article VI).
Après une mise en demeure en juillet 2018, PSA a résilié avec effet immédiat le contrat de Ma Pièces Auto Bretagne le 14 novembre 2018.
Le 5 décembre 2018, le tribunal de commerce de Paris a ordonné au constructeur de reprendre l’exécution normal du contrat pour préserver les 52 emplois de l’entreprise : « quel que soit le bienfondé de cette résiliation (…), cette résiliation aura de lourdes conséquences sur l’activité de la société Ma pièces auto Bretagne, entièrement dédiée au contrat, et donc sur l’emploi des 52 salariés concernés », écrit-il.

Le tribunal de commerce de Paris a estimé « qu’en présence de ce dommage imminent une mesure conservatoire s’impose, jusqu’à ce qu’un accord transactionnel ou une décision judiciaire ait apporté une solution définitive au différend opposant les parties ». Il a donc ordonné « de reprendre l’exécution normale et intégrale du contrat », tout en interdisant « la revente de pièces contractuelles à la société Autopuzz, sauf s’il est prouvé qu’elles sont revendues au réseau ou à un client final ».
Pour Joseph Vogel, avocat spécialisé dans la distribution automobile, cette décision constitue « un inquiétant retour en arrière ».

Dans un commentaire de cette décision paru dans une revue juridique (« L’essentiel du droit de la distribution et de la concurrence ») publiée par Lextenso, l’avocat estime que : « Le juge des référés sacrifie le droit fondamental de rompre pour faute au profit de la sauvegarde de l’emploi. »
Dans ce commentaire, qu’il signe avec son frère Louis, Joseph Vogel cite Xavier et Jacques Vuitton, auteurs d’un ouvrage de référence sur l’état du droit des référés dans lequel écrivent-ils : « Un dommage n’est pas susceptible d’être prévenu en référé s’il est légitime ».
« Les conséquences d’une résiliation régulière ne constituent donc pas un « dommage ». Du reste, à le supposer établi, celui-ci n’aurait-il pas pu être prévenu si la plateforme avait respecté la mise en demeure du groupe ? Sur le fond, peut-on tolérer que l’étanchéité du réseau, sur laquelle repose tout l’équilibre de la distribution sélective, puisse être violé sans conséquence pour son auteur ? Plus encore, une telle solution remet en cause le droit de résiliation pour faute, comme l’avait jugé la Cour de cassation en 2006 (…) », écrivent Louis et Joseph Vogel.

Saisie par le groupe PSA, la cour d’appel examinera ce dossier la semaine prochaine, le lundi 21 janvier à 14h.

Florence Lagarde