Les risques classiques liés au droit de la concurrence auxquels les entreprises doivent faire face sont fort nombreux et importants. En cas de pratiques anticoncurrentielles, celles-ci sont exposées à des amendes administratives qui peuvent aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial de leur groupe, et cela, par grief, mais aussi à des dommages-intérêts envers les victimes de leurs pratiques et à la nullité des clauses ou contrats en cause. Leurs dirigeants et cadres s’exposent à des sanctions pénales (jusqu’à 4 ans d’emprisonnement et 75 000 euro d’amende) en cas de participation personnelle, frauduleuse et déterminante aux pratiques. Le tout, sans parler des effets collatéraux très sensibles en termes d’atteinte à l’image et de dépositionnement commercial de l’entreprise.

Ces risques classiques sont aujourd’hui amplifiés lorsque les pratiques se développent au sein d’organisations professionnelles, dans un contexte général d’augmentation de l’intensité et de la probabilité du risque concurrence. Il convient d’y être d’autant plus sensible que l’Autorité de la concurrence (AdlC) s’intéresse particulièrement à ces pratiques comme en témoigne l’étude thématique d’une centaine de pages en date du 27 janvier 2021 qu’elle leur a consacré.

I) Les nouveaux risques de sanction liés au droit de la concurrence au sein des organisations professionnelles

Les organisations professionnelles et leurs membres encourent de nouveaux risques depuis la transposition en droit français de la directive 2019/1 du 11 décembre 2018, dite ECN+, par l’ordonnance 2021-649 du 26 mars 2021.

  1. Le plafond de l’amende encourue est en forte hausse. Il passe d’une amende maximale de 3 millions d’euro pour les organisations professionnelles, à une amende susceptible d’atteindre 10 % du chiffre d’affaires mondial HT de leurs membres.
  2. Au sein du plafond, le montant de l’amende risque d’augmenter fortement du fait du nouveau communiqué Sanctions. Celui-ci revoit à la hausse quasiment tous les critères de calcul de l’amende : prise en compte du chiffre d’affaires indirect dans le calcul du montant de base, augmentation du taux de gravité liée à la fin de la prise en compte du dommage à l’économie (souvent inexistant) résultant de la directive ECN+, prise en considération, surtout, de chaque année d’infraction avec coefficient 1 au lieu de 0,5, ce qui aboutit à un quasi-doublement automatique du montant de l’amende, etc.
  3. Le recouvrement des amendes peut se faire à l’encontre des entreprises membres de l’organisation par l’effet d’une solidarité renforcée. En cas d’insolvabilité de l’organisation, l’AdlC peut lui enjoindre de lancer un appel à contribution. En cas de défaut de paiement persistant, le paiement de l’amende peut être exigé directement de toute entreprise dont les représentants étaient membres des organes décisionnels de l’organisation. Enfin, à défaut de paiement intégral, l’AdlC peut se retourner contre tout membre de l’organisation qui était actif sur le marché sur lequel l’infraction a été commise, sauf preuve de non-participation à l’infraction.
  4. La pratique décisionnelle de l’AdlC amplifie ces risques. Plusieurs évolutions conduisent à augmenter le montant des sanctions, comme le reproche de plusieurs griefs au lieu d’un seul ou une application immédiate des nouvelles dispositions à des faits antérieurs. La probabilité des risques est enfin accrue par la multiplication des moyens d’action dont dispose l’AdlC et l’augmentation de ses pouvoirs (enquêtes simples qui ont tendance à s’alourdir, enquêtes lourdes difficiles à contester, recours aux enquêtes pénales en vue d’éviter les garde-fous du Code de commerce, autosaisine, clémence, etc.)

II) Les principales infractions pouvant être commises au sein des organisations professionnelles

  1. Les principaux risques d’ententes au sein des organisations professionnelles. Il convient d’être particulièrement attentif à éviter les risques de cartels (Déc. n° 08-D-32 du 16 déc. 2008, LawLex200800002227JBJ ; n° 19-D-12 du 24 juin 2019, LawLex201900000858JBJ), les consignes tarifaires, d’orientation de prix ou de remises (Déc. n° 19-D-19 du 30 sept. 2019, LawLex201900001155JBJ ; n° 20-D-12 du 17 sept. 2020, LawLex202000003000JBJ), les échanges d’informations anticoncurrentiels (Déc. n° 15-D-19 du 15 déc. 2015, LawLex201500001733JBJ), les stratégies d’éviction (boycott, refus d’adhésion discriminatoire alors que l’appartenance à l’organisation présente un avantage concurrentiel) ainsi que l’usage dévoyé du rôle d’une organisation professionnelle.

III) Les moyens de prévention

  1. La mise en place d’un programme de conformité au sein de l’organisation professionnelle et de ses membres est recommandée. Un tel programme passe par un engagement public de respect des règles, la désignation d’un responsable conformité, l’information, la formation et la sensibilisation des salariés et des membres de l’organisation, la rédaction d’une charte concurrence et conformité, la mise en place de règles de tenue des réunions avec convocation, organisation, do’s and don’ts, compte-rendu, mise en place de mécanismes de contrôle et d’alerte ainsi que d’un dispositif de suivi.