CONCURRENCEDROIT EUROPÉENProcédure

La Commission inflige l’amende prévue à l’article 23 du règlement 1/2003 aux entreprises qui ont adopté les pratiques poursuivies ou à celles qui en sont responsables à la date de sa décision. L’imputabilité de l’infraction est source de difficultés lorsque l’entreprise contrevenante a fait l’objet d’une restructuration, c’est-à-dire d’une modification de son organisation structurelle ou de sa forme sociale, depuis la date de commission de l’infraction. La restructuration peut consister en une fusion, une fusion-absorption, une cession de parts, un apport partiel d’actifs…

Selon les autorités de concurrence, l’infraction qui vise l’entreprise, doit, en cas de restructuration de celle-ci, être imputée à l’entité qui assure la continuité économique et fonctionnelle de l’auteur du comportement anticoncurrentiel. L’analyse se décompose en trois étapes. La première consiste à identifier l’entreprise qui a commis l’infraction ; la seconde à vérifier si cette entreprise, à la suite de la restructuration, subsiste ou a été liquidée ; la troisième à déterminer la responsabilité. Si l’entreprise subsiste, elle demeure responsable, sinon l’infraction est imputable à l’entreprise à laquelle ont été transférés les moyens matériels et humains ayant concouru à la commission de l’infraction. Différents cas de figure peuvent se présenter :

– Fusion ou fusion-absorption : l’infraction est imputable à l’entité née de la fusion des deux sociétés qui ont adopté les comportements restrictifs, dès lors qu’elle assure la continuité économique et fonctionnelle de ces entreprises. En cas de fusion-absorption, la société absorbante doit répondre des infractions commises par la société absorbée avant l’opération, même si les actifs qui ont contribué à la réalisation de l’infraction ont préalablement été transférés à un tiers. Lorsque la fusion s’opère entre deux sociétés apparentées, la Commission est en droit d’imputer la responsabilité de l’infraction à la société absorbante sans avoir à rechercher la responsabilité éventuelle de leur société mère.

– Fusion-scission : en cas de scission d’une entreprise membre de l’entente, les sociétés nées de la scission qui continuent de gérer ses unités de production sont solidairement responsables avec l’entreprise du paiement de l’amende jusqu’à sa mise en liquidation, dès lors qu’elles constituent une unité économique.

– Cession : le droit d’agir contre une société sur le fondement des règles de concurrence n’est pas éteint du seul fait de l’acquisition de ses actions par un tiers. La responsabilité du cessionnaire est écartée si, à la date de la décision, l’auteur de l’infraction continue d’exister juridiquement. La règle s’applique aussi bien à la cession totale d’une entreprise qu’à celle d’une branche d’activité. Toutefois, même si l’entreprise initiale subsiste, la société qui a repris l’ensemble de ses activités dans le secteur concerné par des pratiques anticoncurrentielles, est réputée en assurer la continuité économique lorsque les deux sociétés sont unies par des liens structurels. Tel est le cas lorsque, au moment de l’infraction, les deux entités sont détenues intégralement par la même société, qui exerce effectivement une influence déterminante sur elles. Le caractère public ou privé de la société contrôlante est indifférent. La Commission n’est pas tenue de rechercher la responsabilité éventuelle de la société mère mais peut imputer l’infraction au seul cessionnaire. A l’inverse, la Commission n’est pas tenue d’imputer l’infraction commise par la filiale au groupe acquéreur tiers, lorsque la société mère responsable continue d’exister juridiquement et économiquement. Elle n’est pas non plus tenue de répartir le montant de base de l’amende entre le cédant et le cessionnaire lorsque la cession a eu lieu au milieu de la période infractionnelle, dès lors que la gravité de l’infraction ne doit pas nécessairement être appréciée eu égard à l’impact réel du comportement de chaque entreprise sur la concurrence. Selon la jurisprudence, la date pertinente pour apprécier, afin d’établir l’existence d’une situation de continuité économique, si le transfert d’activités a lieu à l’intérieur d’un groupe ou entre entreprises indépendantes, doit être celle du transfert et non celle de l’adoption de la décision qui sanctionne l’infraction. Dès lors, il importe peu que les liens structurels entre les entreprises aient été de courte durée, comme dans l’hypothèse où l’entité cessionnaire a été créée et a reçu les actifs en vue d’une cession ultérieure à un tiers indépendant.

– Transformation : le changement de forme ou de dénomination d’une entreprise n’a pas pour effet de créer une nouvelle entité dégagée de la responsabilité des comportements anticoncurrentiels adoptés par la précédente.