Un restaurateur qui a souscrit en septembre 2017 un contrat de location financière pour du matériel de caisse cesse de régler ses échéances. Après vaine mise en demeure visant la clause résolutoire, l’organisme de financement l’assigne en paiement et obtient sa condamnation. Le restaurateur interjette appel et dénonce le déséquilibre significatif créé par la clause résolutoire, au visa combiné des articles 1171 et L. 442-1, I, 2°. Avant de se prononcer, la cour d’appel de Lyon demande aux parties de s’expliquer sur la recevabilité devant elle des prétentions fondées sur l’article L. 442-1, à la suite de quoi le restaurateur renonce à ce fondement et lui substitue celui de l’article 1171.

En l’occurrence, le contrat de location financière réserve la faculté de se prévaloir d’une résiliation de plein droit à la seule société de financement. Outre cette absence de réciprocité,  la cour relève que cette prérogative peut être mise en œuvre non seulement pour défaut de règlement d’une ou plusieurs échéances, mais aussi dans des hypothèses qui ne correspondent pas à des manquements contractuels à proprement parler et qui n’affectent pas la capacité de l’emprunteur à rembourser son prêt (ex. : modification dans la structure du capital, fusion, scission, inexécution d’un contrat conclu avec une autre société du groupe de l’organisme…). La cour en conclut qu’une telle clause est déséquilibrée et doit par conséquent être réputée non écrite.

La décision soulève de multiples interrogations.

En premier lieu, à aucun moment de son raisonnement, le juge n’a vérifié si le contrat en cause présentait les caractères d’un contrat d’adhésion, c’est-à-dire, en vertu de l’article 1110 du Code civil, un contrat « qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l’avance par l’une des parties », alors qu’il s’agit pourtant d’une condition d’application essentielle du texte (Comp., exigeant une telle appréciation, Douai, 12 juill. 2018, 18/00485 ; Besançon, 11 sept. 2019, 18/00983).

De plus, dans d’autres affaires relatives à des contrats de financement, l’absence de réciprocité de la clause résolutoire n’a pas été jugée source de déséquilibre du fait de la différence de nature des obligations des parties dans ce type de contrat. En effet, l’absence de droit de rompre au profit de l’emprunteur se justifie par le fait que l’obligation de délivrance du bailleur est à exécution instantanée alors que celle du locataire de payer ses loyers est à exécution successive (V. not. Paris, 19 sept. 2014, LawLex20140000944JBJ ; Pau, 13 juin 2016, LawLex201600001183JBJ)

En outre, la cour semble jeter l’anathème sur les clauses d’intuitus personae en général, au motif que les événements visés (fusion, prise de participation, etc.) ne seraient pas de nature à affecter l’exécution de ses obligations par la partie concernée, en l’occurrence sa capacité de remboursement du prêt. Or, si un contrat de financement ne constitue certes pas toujours un contrat intuitus personae, il ne faudrait pas que le préjugé défavorable marqué par la cour s’étende à d’autres formes de contrats, comme les contrats de distribution, dans lesquels un fournisseur peut avoir un intérêt particulier à ce que le contrat soit confié à un distributeur déterminé plutôt qu’un autre qui serait tout aussi capable de l’exécuter.